la méduse et le dragon (dreami)

”Peach ? Vanilla ? Pear ? I don’t know Hanaoka !”  lance le garçon en humant une dernière fois le poignet de sa copine qui cherche tant à lui faire reconnaître l’odeur qu’elle porte actuellement. ” I don’t have any nose cells anymore anyway ! Smoke killed them all ” ajoute-t-il avec une note d’humour.  ”But it smells good anyway ! Not better than my BBQ Pulled Pork Bagel tho”  conclue-t-il en venant croquer son sandwich, accompagné d’un petit soupir de satisfaction. Il pourrait carrément s’en lécher les doigts et c’est ce qu’il fait, une seconde plus tard après s’en être mis partout. Programme du jour ? Bien manger, bien profiter du temps, et surtout bien faire voler les cerfs-volants achetés quelques jours plus tôt. Si Somi avait voulu une baleine, le vendeur lui avait finalement conseillé d’acheter un modèle plus petit,puisqu’il s’agissait d’une première fois. Elle avait donc choisi une méduse de couleur rose. Andrea lui, s’était laissé convaincre par la blonde et avait opté pour le dragon rouge qu’elle avait proposé.

Aujourd’hui était donc le jour d’essai, le ciel était assez dégagé et ensoleillé mais le vent était assez présent pour que le cerf-volant prenne son envol correctement. Comme, la plupart des amateurs de cette activité, c’est donc en bord de mer qu’ils s’étaient rendus pour commencer à pratiquer. Mais avant tout, il fallait grignoter, et c’est comme cela que le couple s’était rendu à un snack près de la plage pour se commander deux bubbles teas et deux petits plats. C’était d’ailleurs dans ces moments-là qu'Andrea se sentait le plus heureux. C’était pour ces petits moments, à la fois au milieu des gens, et à la fois juste entre eux, dans leur bulle. Pourvu seulement que personne ne vienne les déranger. Vu le monde agglutiné sur la plage aujourd’hui, il savait qu’ils ne pourraient pas être trop démonstratifs.

”Love your outfit by the way ” Petit clin d’œil ajouté à son compliment avant qu’il ne reporte son attention sur un oiseau venant de piquer un morceau de gaufre à un adolescent. De son regard curieux, il suit toute la scène, ne remarquant même pas qu’un morceau de salade est sur le point de tomber de son sandwich. Il lève alors la tête pour suivre le volatile qui vient alors se poser sur le haut d’un toit d’immeuble donnant vue sur la mer. Ses pensées se tournent alors vers l’immeuble en lui-même, puis les balcons dont il imaginait la vue incroyable, et à ce moment des tas de questions viennent s’agglutiner dans l’esprit du garçon. Est-ce qu’il s’agissait de locations saisonnières seulement ? Est-ce que ces appartements étaient grands ? Est-ce qu’ils étaient à vendre ou à louer ? Comment pouvait-on les visiter ? Et surtout, combien est-ce qu’ils coûtent ? Parce que pendant une toute petite seconde, le jeune homme se serait bien imaginé vivre là, en bord de mer, pour pouvoir tous les jours, manger son petit sandwich, sur le sable, et pouvoir poser sa tête contre les cuisses de sa copine, chose qu’à l’instant-T, il s’était proscrit de faire.

Alors à la place, il se contente simplement de fixer Somi droit dans les yeux, sans vraiment s’arrêter. Ce genre de regard, qui, d’une minute à l’autre,la pousserait à lui demander ”Why are you looking at me ?”. Sans doute qu’elle penserait avoir quelque chose sur le nez, ou peut-être entre les dents. Sûrement qu’il s’en amuserait et la laisserait paniquer un peu, pour ensuite lui dire qu’elle était juste jolie. En tout cas, c’est ce qu’il aurait aimé lui dire. Pas sûr qu’il y arrive aussi facilement. Alors pendant un instant il hésite. Entre lui demander s’il peut l’embrasser, ou s’il peut la prendre contre lui. Mais il ne bouge pas. “Are you happy ?

Elle secoue la tête pour la énième fois à la nouvelle tentative du garçon qui essaye désespérément de trouver le nouveau parfum de sa petite amie. Somi met donc fin au terrible mystère : “ Hibiscus ! ” qu’elle annonce en humant une nouvelle fois son poignet - la réponse lui paraît à nouveau évidente et, alors qu’elle tend son bras vers Andrea, ce dernier ne s’intéresse maintenant qu’à son sandwich qu’il croque à pleines dents quitte à ce que ça déborde d’un côté ou de l’autre. Subtilement, la jeune femme lui tend donc une serviette amorçant la chute d’une feuille de salade pleine de sauce barbecue. Son plat à elle est moins compliqué à manger ; des croquettes de poulpe qu’elle pioche avec un pic en bois. D'ailleurs, avant d’en terminer la moitié, la chanteuse demande à être prise en photo avec sa nourriture. Le décor s’y prête ; le bord de plage à beau être bondé, le couple a échappé à la foule agglutinée dans la zone de baignade surveillée, le soleil haut dans le ciel brille au point de rougir leurs peaux mais le vent atténue toute sensation désagréable. La star peut donc confortablement prendre la pose devant ce paysage insulaire et son photographe n’a d’autre choix que d'immortaliser la sirène et son repas. Quelques minutes plus tard, l’étudiante est sur le téléphone en train de trier les clichés pendant que l’auteur attend le verdict. “ I like this one… and this one ! ” Somi tourne l’écran vers Andrea puis l’idole repart dans ses comparaisons entre la photographie 1 et la photographie 4 jusqu’à faire son choix final qu’elle postera plus tard - surtout pas maintenant, car donner sa localisation en temps réel amènerait une vague de curieux au même endroit. Et aucun des deux amis n’avait prévu autre chose que de profiter de la compagnie de l’autre ; le programme était clair pour aujourd'hui - casse-croûtes sur la plage et courses de cerf-volants achetés plus tôt dans la semaine.

La jeune femme lève les yeux de son téléphone pour rencontrer ceux de son petit ami. “ … What ? ” Elle sourit car il a l’air perdu à contempler quelque chose sur son visage. Il y a donc un certain silence qui apporte une réponse sans qu’aucun mot ne soit échangé ; les deux prunelles de l’idole s’attardent un instant sur les lèvres du garçon. Ils ont beau être dans leur bulle, le couple sait très bien que ce n’est pas l’endroit pour des échanges affectueux. Somi ne s’autorise donc qu’un énième sourire et une main discrète qui s’enterre dans le sable pour rejoindre celle de Andrea. “ Yes, I am. We’re about to go kite, I can’t be anything else than happy… ! ” Réponse simple qu’elle donne à une question qui pourrait être compliquée si elle avait envie d’y réfléchir plus longtemps. “ And you ? ” Elle s’enquit plutôt de la réponse du hiisa qu’elle espère tout aussi heureux qu’elle - même si, au fond, la musicienne redoute que cette question posée innocemment cache une déception chez lui. Ses doigts se resserrent donc sur les siens et, pour chasser tout nuage gris, Somi propose de sortir leurs cerfs-volants. La voilà donc en train de tirer sur sa main pour l’aider - le forcer à se lever.

Quelques instants plus tard, les deux cerfs-volants sont à terre comme deux gros ballons dégonflés. “ So… réfléchit Somi en regardant les deux animaux tout plats, we just have to run and it will fly, right ? ” C’est ce que le vendeur avait plus ou moins expliqué mais Somi venait de faire un résumé plus que sommaire. Il y a la direction du vent à prendre en compte ; chose que l’idole finira par se rappeler à force de voir sa méduse décoller faiblement du sol en raclant le sable. “ Ok… I think I will get it this time ! ” Elle recommence son parcours dans le sens inverse, croisant à nouveau la route de Andrea. Petit à petit, le miracle se produit. La méduse prend son envol et gonfle entre les bourrasques, elle lâche des bulles d’écume tandis que le dragon rouge à ses côtés lance des jets de flammes colorées. “ It’s so pretty… ” Bien qu'émerveillée, la gamine ne se déconcentre pas pour éviter que les deux cerfs-volants ne s’emmêlent. “ Can we let them fly higher ? ” La jeune femme libère de la ficelle dès le feu vert de Andrea pour que leurs deux jouets puissent survoler encore un peu la mer.

La réponse de Somi convient bien au loup. Il sourit doucement, et se sent un peu plus apaisé de savoir que ce genre de petits moments, ce genre d’activités, lui convient. Évidemment, la blonde retourne la question et prend son copain au dépourvu. Il hoche la tête, lentement, les émeraudes fixant les grains de sable autour d'eux. Puis il répond, “Yes I am.”, en relevant son regard assombri pour le poser de nouveau sur la Japonaise, les perles du garçon prenant alors une couleur plus océane à la lumière. Il était heureux bien évidemment. Heureux d’être ici avec elle. Heureux de la rendre heureuse surtout. C'était tout ce qui comptait au final, qu'elle soit heureuse en sa compagnie. Et c'est aussi ce qu'il redoutait le plus, qu'un jour elle puisse s’ennuyer de lui, qu'un jour elle lui annonce qu'il n'était plus l'ami qu'elle voulait à ses côtés. Pour lui, c'était impensable. Il ne se voyait pas donner de l’attention à une autre personne qu'elle. Il pouvait en apprécier beaucoup (amicalement), les trouver gentilles voire même mignonnes (toujours amicalement), mais rien n’égalait ce que Somi lui faisait ressentir. Il se sentait écouté. Écouté, compris, encouragé et surtout aimé.

Le soleil brille haut dans le ciel, mais les nuages sont aussi présents; ils se laissent pousser par la fine brise qui est assez forte pour permettre aux cerfs-volants de voler mais assez légère pour ne pas venir gifler le visage des vacanciers présents pour le week-end. C'est donc la condition idéale pour le couple d’amis qui ne perd pas un instant de plus. Ils étendent leurs animaux synthétiques sur le sable et se reculent doucement. L’eau est à plusieurs mètres, il n’y a donc pas de probabilité pour que celle-ci viennent noyer leurs cerfs-volants. Après quelques manipulations en tout genre, les garnements peinent un peu à faire décoller leurs animaux respectifs. Les pensées du garçon s'emmêlent aussi vite que la ficelle dans ses mains. Doit-il tirer, ou relâcher ? Il a oublié ce qu’on leur a dit. Pourtant il essaye de copier les faits et gestes de Somi mais se rend compte qu’elle même n’a pas les bons réflexes. Après quelques essais, ils finissent tous les deux par faire voler leurs machines volantes, le dragon prenant son envol en premier, suivi par la méduse, qui une fois dans l’air, laisse échapper des bulles le long de ses tentacules. Et le spectacle est joli à voir. Lorsqu’Andrea tire un peu sur sa ficelle et la bloque, le reptile aux écailles rouges fait alors battre ses ailes pour prendre toujours plus de hauteur. Et lorsque l’Anglais relâche le fil de nylon, le dragon ouvre la gueule pour lancer des flammes colorées qui viennent égayer le ciel et chatouiller les tentacules de la créature marine, à quelques mètres de lui.

Andrea en rigole tandis que Somi s'occupe de ses affaires. L’espace d’un court instant, lorsqu’il sent que son dragon vole correctement, le sportif s’octroie quelques minutes pour regarder la musicienne placée à quelques mètres de lui. Sur cette plage, ils sont juste deux amis quelconque parmi d’autres. Sauf peut-être pour cette âme esseulée qui depuis une heure maintenant les guettent, un peu plus haut. Une ombre présente pour Somi ou pour Andrea ? Allez savoir, seule la vidéo actuellement en marche pourrait fournir une réponse. Mais ça, le couple l’ignore. Surtout Andrea qui lui, est trop occupé à contempler la blonde. Il détaille alors tout son visage. Ses jolis yeux noisettes, son petit make-up qui, à la lumière du jour brillait davantage ou encore ses longs cheveux blonds polaire qui lui descendent jusque dans le dos. Et puis il y avait surtout ce sourire qui était là pour lui prouver une nouvelle fois qu’elle était heureuse d’être là, avec lui. Et c’est seulement lorsqu’il entend Somi l’appeler pour le sortir de ses songes qu’il remarque que son dragon descend bien trop vite et file droit vers la mer. Alors il se recule comme il peut pour éviter que l’armature ensorcelée ne vienne s’accrocher à un autre cerf-volant. Ses pas sont trop pressés et c’est ainsi qu’il finit par se cogner contre un groupe légèrement plus jeune qu’eux. « Oh sorry ! I didn’t see you ! Everything’s okay? » Personne n’est à terre, mais les quatre membres du groupes expriment alors leur stupéfaction. Et puis l’une d’elle crie presque de surprise. Et dans sa réaction, il reconnaît bien évidemment le prénom de Somi. Voilà qu’on l’a reconnaît encore. Il fallait s’y attendre après-tout… Si l’un des membres du groupe, peut-être le plus agé, semble déjà prêt à demander une photo à Somi, une jeune femme près de lui observe Andrea avec suspiscion. Elle sait qu’elle l’a déjà vu quelque part, elle ne serait juste pas dire où. « No photo please, enfin je veux dire, pas aujourd’hui, on veut juste profiter un peu » Si son refus est bien mérité il n’a pourtant pas encore été approuvé par Somi. Et il n’a pas vraiment le temps d’insister car il se sent soudainement tiré par son cerf-volant qui vient tout juste de terminer la tête la première dans l’eau. Alors il s’avance un peu plus vers la mer et abandonne la blonde pour récupérer la créature de papier.