maybe I can show you when it goes down (niraia)

Here I'm yelling out
I'm not the queen
You and I can maybe make it out
You are my adrenaline
Bring the castle down
Maybe I can show you
When it goes down
Il pourrait faire nuit noire, ça ne changerait rien, parce que dans ses yeux, dans sa tête, il fait grand soleil, à provoquer une éclipse et lui brûler la rétine. Il y a tellement de lumière que la Lune elle-même irait se cacher, n’oserait pas se montrer, parce que Gaia lui a volé la vedette, à tel point que le soleil n’ose pas l’attaquer, l’épuiser, s’est mis sur le bas-côté - au milieu il n’y a que Gaia en impératrice-colère, les poings serrés et les mots qui s’enchaînent, sans hésiter, sans bégayer. Elle ne voit plus rien d’autre que sa colère, se laisse submerger par ce tsunami, ce déferlement de rage couleur soleil dont elle ne comprend pas tous les tenants et les aboutissants. Elle ne sait même plus par quoi ça a commencé, sans doute une remarque à la con qui ne voulait pas dire grand-chose, mais ça a suffi pour la mettre en colère, vraiment, pour réveiller des troubles sur lesquels elle ne pose pas de mots. Elle regarde le garçon d’en face avec toute sa haine et sa fureur et c’est comme si elle était ailleurs, comme si les connexions ne se faisaient plus. Gaia a remplacé le soleil du ciel par celui de son ventre, de ses tripes, et elle ne s’entend même pas vraiment le menacer, ne remarque pas que la colère est devenue sourde, que peu à peu les mots s’arrêtent et que le grondement de colère s’apaise, d’un coup. Pour elle, le ciel est toujours sombre, le silence n’est qu’un signe avant-coureur de l’arrivée du tonnerre.
Sauf que Gaia n’a plus la faiblesse de l’avant-Chute, l’avant-jour frabieux et que l’éclair passager ne parvient qu’à dévoiler le pire, ce qui va advenir : les crocs sortis, la tempête-colère s’apprête à s’abattre sur un innocent mage, témoin, que sais-je. Ce qui est sûr, c’est qu’à la fin, au milieu il n’y aura que Gaia en impératrice-colère, couverte de sang et de regrets, avec à ses pieds le corps inanimé (ou pire, transformé?) d’une victime de troubles colériques qu’elle n’aura pas su contenir. Mais il est déjà trop tard pour qu’elle en prenne conscience, obnubilée et aveuglée par sa rage, seulement capable de penser que cette fois, elle ne s’en tiendra pas aux poings serrés et à l’impuissance physique de se défendre. Alors elle s’élance, pour le pire comme pour le pire, sans même jeter un regard aux alentours ; si elle signe sa fin, qu’ainsi soit-il.

I know it hurts
It's hard to breathe sometimes
These nights are long
You've lost the will to fight
Ciel qui se couvre, comme à l'approche d'un tempête, quand le tonnerre est prêt à frapper le sol avec toute sa force, toute sa fatalité. Jusqu'à en électrifier les âmes, en brûler le bout des doigts, nécrosant la chair des carcasses à peine vivantes. Sans savoir s'il l'est lui-même, vivant. Il n'est pas mort non plus, corps froid et changé, ne désirant qu'un liquide rouge divin ; il n'est plus humain depuis longtemps, il ne le sera plus jamais même si son humanité demeure. Il n'a plus rien de l'enfant d'antan, des rêves accrochés aux tripes, il n'en reste que la sagesse et la bonté qui l'a toujours habité. Parce que NIran, avant tout, n'est pas un monstre. Jamais considéré comme tel à ses propres yeux, il n'est qu'une victime comme beaucoup d'autres. Il n'est qu'un être au syndrome du saveur qui s'accroche, croit pouvoir porter le monde sur ses épaules, sauver ceux qui ne cessent de s'égarer. Tâché de sang, il ne sera plus jamais pur ; le nom bafoué, enterré avec ses parents sur les terres natales, loin d'ici.
Solitude dans le coeur, il ne s'en plaint jamais, parce que c'est ainsi que les choses continuent de fonctionner. Il avance seul, parfois accompagné de quelques âmes sur son chemin. Sourire parfois mystérieux, on ne sait jamais grand chose sur lui. Il se laisse porter par le vent, par la vie, ses pas qui frappent le dédale en quête d'un lieu précis pour y retrouver une connaissance alors que le ciel se couvre peu à peu. Toujours dans son monde, il n'y a que la colère que l'on entend au loin qui le fait réagir alors que son corps se dirige, comme attiré, vers le bruit. Silhouette qu'il connaît que trop bien, et pourtant pas assez. Il peut simplement poser un nom dessus, Gaia. Des souvenirs que l'on a enterré pour ne pas s'attacher, il voulait juste la sauver. Mais en voyant la scène, s'approchant petit à petit, il comprend rapidement la gravité de la situation, les pas qui s'accélèrent, le silence devient pesant et il redoute les secondes ; alors qu'elle se jette sur l'inconnu, âme innocente. Sa main à juste le temps d'agripper son épaule avant que ses bras se referment autour d'elle, No!, téléportation instantanée loin de l'agitation et des regards curieux. Non sans redoutée sa réaction, il se doute qu'elle ne l'aime pas, elle l'a toujours si bien fait savoir. Alors une fois en lieu sûr, ses bras relâchent la carcasse fragile, venant l'affronter de nouveau. The fuck are you doing? Le voix reste calme ; toujours trop paisible, à en irriter les dieux.

Here I'm yelling out
I'm not the queen
You and I can maybe make it out
You are my adrenaline
Bring the castle down
Maybe I can show you
When it goes down
Plus rien ne compte, parce qu’il n’y a plus rien d’autre que la colère dans son cœur, dans ses tripes. Gaia n’ouvre pas cette boîte très souvent, contrôle ses émotions à la perfection - jusqu’à ce que. Il y a toujours ce point de rupture, que la majorité du temps elle ne fait qu’effleurer, que frôler. Le rouge n’arrive jamais vraiment, reste au rose framboise, sur le point de, mais jamais vraiment. Ça n’arrive pas, qu’elle se sente emportée par la vague, par ce tsunami-colère capable de tout détruire sur son passage. Et peu importe les raisons, peu importe les justifications, elle finit toujours en tremblant une fois ramenée à la réalité, au bout de quelques secondes.
Mais là, les secondes commencent à être un peu longues.
Elle ne les voit pas passer, parce que pour elle tout se fait en une poignée d’instant, un seul grain de sable. Aucune différence entre le moment où elle s’est énervée contre cet inconnu qui n’avait rien demandé à personne (mais qui l’avait suffisamment énervée pour provoquer la crise) et celui où elle se préparait à s’élancer, le cœur battant et la respiration-tempête. Elle n’a pas tout compris, parce que dans ces moments-là elle ne comprend pas grand chose. Sait seulement que ses yeux se sont allumés d’un rouge ardent, rouge passion, et que le feu ne l’a pas arrêtée, bien au contraire. Tout ce qu’elle parvient à penser, c’est qu’elle doit apaiser sa colère, peu importe les conséquences. “No!” Alors de la même manière elle ne comprend pas quand des bras viennent l’enserrer pour l’emmener loin, se photoporter ailleurs ; elle est comme coupée dans son élan, une bête sauvage réveillée qu’on vient d’empêcher de tuer, mais qui en rêvait tellement qu’elle ne comprend pas ce qui se passe. Gaia ne se ressemble plus, le visage pourpre et les crocs dehors. Elle saisit à peine qui s’est dressé devant elle et sa vengeance, mais en comprenant que c’est lui, elle ne s’embarrasse pas de savoir qu’il va la voir transformée. Elle sait que de toutes façons, Niran est au courant pour sa transformation, persuadée qu’il doit bien se moquer d’elle et de sa situation ; c’est ce qu’elle avait fini par lui cracher, lors de leur dernière dispute. Mais elle ne pense plus à rien d’autre qu’à ce qu’il vient de faire, à ce fil qu’il s’est permis de couper. C’était pour la sauver, certes, mais le trouble de la colère est comme ça, il ne voit pas ce dont il a besoin. Se concentre sur le fil coupé sans voir que s’il ne l’avait pas été, ça aurait été bien plus compliqué. “The fuck are you doing?” Tout ce qu’elle pense, c’est qu’il n’avait pas le droit de l’arrêter ; et s’il ne l’avait pas lâchée, elle l’aurait probablement mordu lui, même si ça n’aurait eu aucun effet. Serait retournée dans la ruelle par elle-même, mais une part de son esprit comprend qu’elle n’est pas en état de se photoporter. “The fuck are YOU doing!!” répond-t-elle en hurlant (et c’est peut-être la première fois qu’il l’entend jurer), “You had no right!!!”, les poings qui viennent s’écraser contre lui avec toute la force dont elle est capable - pas énorme, malgré la colère. S’époumone en continuant à le frapper, d’un “Bring me back!!!!” hurlé comme s’il allait l’écouter.

I know it hurts
It's hard to breathe sometimes
These nights are long
You've lost the will to fight
La mort est calme, silencieuse. Elle n'est pas douce, elle est capricieuse et sévère. Elle emporte sans même regarder les visages, sans aucune pitié. Et Niran s'en souvient, ce jour là. Il se souvient l'avoir vu de ses propres yeux, l'avoir senti au moment où les crocs se sont plantés dans sa chair encore tremblante. Il se souvient l'avoir regardé dans les yeux, un instant. Perles rouges qu'il ne cesse de revoir dans le reflet de son miroir. Il est devenu la faucheuse, une faucheuse. Celle qui refuse d'emporter, d'emmener les âmes. Celle qui préfère la vie à la mort. Le sang qui s'écoule sur les lèvres, qui laisse un léger gout amer sur sa langue. Il se refuse les peaux encore chaudes, les dos frissonnant et les cou que l'on offre sans peur. Car cette peur, elle vit déjà en lui depuis toujours.
Il ne veut pas engendrer la haine ; il ne veut pas qu'elle se tâche de sang, de crime. Car elle en portera à jamais le poids dans son coeur ! Sa poitrine se tâchera de sombre, là où le myocarde semblait battre autrefois. Alors il affrontera ses hurlements, ses poings contre son torse, la colère dans sa voix qui ne l'atteindra jamais. You can't do this. Il reste là, devant elle. Il ne bouge pas, pas même sous les coups car sa force n'a pas d'impact sur lui. Ses mains, tendresse d'un monstre, viennent enfin attraper ses poignets, alors que ses propres yeux changent eux aussi de couleur pour s'accorder aux siens. I wont bring you back. You're not a monster. You're not like this. La voix est plus forte, un peu plus sévère, mais elle ne s'élève pas plus que la sienne dans la ruelle où les yeux ne se posent plus sur eux. You need help. Don't be a killer. Il est plus grand, le regard baissé sur elle, mais il ne se rapproche pas, ne s'impose pas. Il lui laisse de la distance, pour qu'elle respire, pour qu'elle ne se sente pas menacé. Calm down, okay? I’m not here to hurt you. If you want to bite, do it to me, not an innocent person. No one deserves it./ Car au fond de son coeur, il sait tout autant qu'elle que ce n'est pas juste.

Here I'm yelling out
I'm not the queen
You and I can maybe make it out
You are my adrenaline
Bring the castle down
Maybe I can show you
When it goes down
On ne pense jamais aux conséquences, avant de s’élancer dans la tempête, de faire corps avec elle. Elle ne pense qu’à ce qu’elle ressent, à cette colère qui gronde, qui bouillonne. C’est comme si l’esprit s’était arrêté et d’une certaine manière il se protège autant qu’il s’ignore, s’évite, comme si les pensées étaient devenues trop lourdes à porter et que la seule solution se trouvait dans l’auto-destruction. Parce que Gaia se détruit autant qu’elle voudrait le détruire lui, cet innocent qui n’a même pas de nom (la colère n’en avait pas besoin pour s’exercer), qui se trouvait peut-être juste au mauvais endroit au mauvais moment.
Les parallèles sont criants, mais Gaia ne les voit pas ; comment le pourrait-elle ? Elle est aveuglée, illuminée par la noirceur, incapable de voir au-delà de ce qui bouillonne. Elle ne sait sans doute même plus ce qu’il lui a dit, ce qu’il a fait de si ignoble. L’essentiel, c’est qu’elle veut, non, elle a besoin de le détruire, dans une logique à la con de marche ou crève sans queue ni tête. Alors quand Niran, impassible, calme, répond à la tempête que “You can't do this.”, évidemment qu'il a raison. Même si elle s’y refuse, même si elle ne l’entend pas, au fond tout lui donne raison. Elle aura beau tenter de le frapper, écraser ses poings contre le corps qui ne bouge pas, malgré toute la force qu’elle y met, toute la hargne, Niran restera de marbre, la réalité contre la folie. “I wont bring you back. You're not a monster. You're not like this.” Elle voudrait lui hurler qu’il a tort, mais tout ce qui sort de sa bouche ne sont que des cris de rage sans substance, des mots parlés dans une langue inexistante, qui hurlent seulement des pensées qu’elle ne parviendrait pas à verbaliser. Et lorsqu’il lui attrape les poignets, la stoppe dans son élan, Gaia n’a plus d’arme à sa disposition, la tête arrêtée contre son torse, la respiration lourde et saccadée d’après l’effort. Ne s’arrête pas de fulminer, même si leurs regards ne se croisent plus, simplement elle n’y peut plus rien, parce qu’il a beau être tendre, il ne lâche pas prise. “Leave me alone!!!” Elle tente une dernière fois, mais il est plus fort qu’elle et les poignets ne se libèrent pas ; toujours en pleine tempête, mais essoufflée et impuissante. “You need help. Don't be a killer.”
Et soudain, le temps se suspend. Don't be a killer.
Les parallèles s’imposent, du fait d’un seul mot. C’est vrai ça, elle en a oublié sa propre transformation ; n’a pas vu qu’elle s’apprêtait peut-être à lui faire subir ce qu’elle a subi. En a oublié la violence, la peur, en a oublié le cauchemar sans fin dans lequel l’événement l’a placée. En a oublié à quel point la descente aux Enfers l’avait chamboulée, malmenée au point qu’elle avait voulu en finir plutôt que de rester transformée en monstre.
Et cette fois, c’est elle, le monstre.
Gaia arrête de résister, pendant que Niran appuie le couteau sur la plaie, touche juste. “Calm down, okay? I’m not here to hurt you. If you want to bite, do it to me, not an innocent person. No one deserves it.” Les deux dernières phrases se répètent en boucle, litanie insupportable mais nécessaire. Gaia se calme effectivement, comme assommée par deux simples termes qui résonnent, l’invitent à choisir son camp. Killer, innocent. En elle se disputent deux Gaia, l’une toujours en proie à la colère, l’autre qui tente de ramener du rationnel, s’accroche à son caractère habituel - c’est elle qui gagne, d’une certaine manière, quand Gaia retrouve un semblant de sérieux et force Niran à lâcher ses poignets, d’un “Let me go.” qui sonne aussi ferme que possible. “I’m beyond saving, you should be glad, I deserve it don’t I?” Sitôt libérée, elle s’écarte, les jambes qui se plient et les mains qui se cachent le visage. Accroupie, les yeux fermés, Gaia tente de calmer sa respiration, projetant dans son esprit des visages amicaux, parce que ce n’est certainement pas le sien qui va la calmer, bien au contraire. Retrouve sa chétivité habituelle, petit à petit, le cœur qui bat toujours à cent à l’heure, mais bien loin de la tempête d’il y a quelques instants.

I know it hurts
It's hard to breathe sometimes
These nights are long
You've lost the will to fight
La mort a sonné un jour, lorsqu'il ne s'y attendait pas, alors qu'il faisait route sur les chemins de campagne pour rejoindre les collines et les rayons du soleil qui épousaient leurs formes. Il avait les genoux bousillés, les bras bleutés de se cogner partout. Et soudainement, le temps s'est arrêté. Les coeurs ont cessé et le sien s'est juste habitué à faire semblant de battre, sa poitrine se soulève discrètement pour mimer une quelconque vie dans ce corps si pâle, devenu marionnette du sang et de la nuit. Victimes de ceux qui prennent plaisir à détruire des vies, ils deviennent eux même faucheuses s'ils finissent par céder à leurs pulsions, aux voix qui rugissent dans leur esprit. Il sait à quel point c'est difficile, Niran. Il n'était qu'un gamin alors qu'il hurlait pour quelques goutes de sang, quand il tentait de sauter aux coups de ceux qui osaient s'approcher. Mais cette histoire, c'est bien quelque chose que Gaia n'entendra surement jamais parlé. Visage souvent froid, la voix calme et les gestes lents comme de peur d'en briser les corps qui se glissent sous ses doigts. Et elle semble aussi fragile que tous ceux qu'il a pu connaître. Aussi perdue que ceux que l'on abandonne dans les abîmes, sans lumière, sans fil rouge. Et il ne peut rien pour elle, car elle ne cesse de le repousser ; et elle en a toutes les raisons. - du moins il voudrait y croire. - Fine. Il souffle alors qu'elle se défait de son emprise légère, il l'observe, ses cheveux châtain, la pâleur de sa peau qui lui rappelle la sienne, sa colère et son ammertume, le sérieux qui l'a longtemps rendu curieux, les grains de beautés à la naissance de son cou. Quelque part, son coeur espère encore, se dit que tout n'est pas perdu, mais il est le seul idiot à y croire. You don't, Gaia. But im gonna leave. Please, don't do something stupid. Il tend sa main face à lui avant qu'une fiole rougeâtre y apparaisse. Sans s'abaisser, sans s'approcher de plus, de peur de l'effrayer, elle se pose aux côtés de la jeune femme. Drink it. Il replace le col de sa veste, quelques mèches qui tombaientt devant son visage, après les secousses d'une bataille sans réelle violence. Il voudrait lui dire à bientôt, mais destin funeste, il préfère ne pas s'y accrocher. Take care. Ses pas s'éloignent dans la rue, les fins talons de ses chaussures qui rencontrent les pavés. Et pourtant, il s'arrête un instant, tournant la tête une dernière fois vers elle, fin sourire sur ses lèvres, on ne saurait dit s'il est nostalgique ou triste. Ou autre chose. Niran qui s'envole encore une fois dans la foule, comme s'il n'était qu'un fantôme du passé.

Here I'm yelling out
I'm not the queen
You and I can maybe make it out
You are my adrenaline
Bring the castle down
Maybe I can show you
When it goes down
Elle s’est perdue dans sa propre colère. S’est noyée dedans comme dans un verre aux airs d’océan, interminable et à la fois oppressant, tout juste capable de voir au-delà du rouge qui colore ses pupilles et son champ de vision. Ce n’est pas la première fois et ce ne sera pas la dernière, même si Gaia a du mal à reconnaître l’existence de ces crises de colère, se sent légitime d’être agacée par des comportements à la faible intensité - qui pour elle se muent en montagnes, en torrents ou en ouragans. Dans ces moments-là, elle est inarrêtable, parce qu’elle n’entend rien. Est bien trop loin de la réalité, du rationnel, pour être capable de passer outre, encore moins de se calmer. Et peut-être que ce poignet accroché l’a aidée, même si elle ne le reconnaîtra pas ; peut-être que cette manière de la ramener, sans le dire vraiment, l’a sortie de sa léthargie, même si elle ne le reconnaîtra pas. Elle se dit seulement que désormais son poignet est libéré, que Niran l’a lâchée et qu’il doit bien se moquer. Persuadée de pensées et d’opinions qu’il n’a jamais confirmées, mais qu’elle persiste à croire vraies. Alors, quand il lui dit, “You don't, Gaia. But im gonna leave. Please, don't do something stupid.”, elle n’y croit qu’à moitié - mais elle ne relance pas les braises et la tempête ne reprend pas. C’est déjà ça.
“Drink it.” Sans bouger, elle jette un œil à la fiole posée juste à côté, dont le liquide pourpre sans équivoque l’appelle (la supplie). Mais elle garde le silence et n’obéit pas, bien trop fière pour le faire, encore moins devant lui. Elle sait qu’elle devra la boire, cette fichue fiole, mais elle ne lui fera pas le plaisir de la boire maintenant, alors qu’il regarde, assiste à sa tragédie, de sa place de spectateur arrogant et cynique (c’est en tous cas ce qu’elle imagine). “Take care.” Elle attend un moment avant de relever la tête, vérifie qu'il est bien parti ; Niran est déjà loin et Gaia ne le voit pas la regarder, alors qu’elle tend la main pour attraper la fiole et boire son contenu comme si elle en avait été privée pendant des jours. Le sang lui donne évidemment une satisfaction insupportable, qu’elle exècre, comme toujours - mais quelque part, au milieu de la colère et du ressentiment qu’elle éprouve pour son sauveur, naît un merci en silence que Gaia a pour le moment trop de fierté pour prononcer à haute voix.