i (used to) get you ☼ saebyeog

Si on le lui demandait : non, il n'ignorait ni ne fuyait Saebyeog. Il évitait simplement les conversations prolongées. Il y avait, à chaque fois que le garçon plongeait son regard dans le sien, une certaine tension qui n'était pas partagée, loin de là. Simple sensation pesante sur le bord de sa poitrine, Havan était certainement le seul d'entre eux à avoir cette impression d'être sondé, d'être un livre ouvert, finalement, entre ces rayons. Car les livres n'ont pas de secrets, pour lui. N'en avaient jamais eu, depuis qu'ils s'étaient connus. Mais cet environnement de travail sonne habitude, et de l'habitude, c'est ce dont il a besoin, Havan. D'être dans un environnement familier, de se sentir bien entouré pour apprendre. C'est tout ce qui l'avait jamais maintenu dans ses études (tout ce qui l'avait empêché de craquer).

Se levant de sa chaise pour aller s'emparer d'un nouvel ouvrage, pourtant, il se cogna à lui sans trop regarder où il allait. Et les regards se croisent, et, presque aussitôt, se détachent. « Oh, hi. »  Comme depuis sa morsure, Havan contourne le(s) problème(s) et passe à côté de lui, comme si de rien n'était. « I'm sorry. » Avant de réaliser qu'en fait, il est vraiment juste devant la rangée qui l'intéresse. Alors ses pieds l'empêchent d'aller plus loin, observent derrière la tête de son ami sans trop rien dire (awkward). Le temps semble se suspendre un instant, et le voilà qui fait demi-tour, abandonnant sa mission première comme s'il s'agissait de quelque chose de tout à fait naturel à faire. Sans rien dire.

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Il s’était dit (s’était persuadé) que Havan désirait du silence, alors c’est exactement ce qu’il lui avait donné, avait rapidement abandonné, par politesse, par respect, les tentatives de messages laissés sans réponse ou bien les trois mots laconiques qui ne menaient à rien. Plusieurs mois déjà qu’il n’avait pas franchi la porte de la librairie, d’ailleurs, mais Saebyeog ne savait pas si c’était lui ou si c’était autre chose, n’avait pas osé trop insister. Alors il n’ose pas non plus lui parler lorsque ce matin, Havan cherche entre les rayons un livre en l’ignorant. Se contente de se plonger dans le travail sans trop réfléchir, un peu triste de cette amitié-brouillon qui s’estompe avec le temps, mais incapable de forcer une discussion que le mizu veut visiblement éviter. Peut-être aurait-il dû, ça aurait été moins gênant que cette bousculade au détour d’un rayon, les yeux qui croisent les siens mais les perdent aussitôt ; ni lui parler, ni le voir, apparemment. Il a le cœur serré en le comprenant, triste d’avoir à ce point perdu son ami. “Oh, hi. I’m sorry.” Il repart comme si de rien n’était et Saebyeog reste interdit un instant, confus, avant de s’aventurer vers lui, de le rattraper en quelques pas. “Hey, Havan? Did you need something?” Un moyen de se hasarder doucement en terres inconnues (hostiles), la question sous-entend le reste, les interrogations vieilles de quelques mois, sur une amitié dont Saebyeog ne sait plus si elle existe vraiment.

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Il ne s'était pas attendu à ça, Havan. A une confrontation, aujourd'hui. Au regard curieux de Saebyeog posé sur lui, à son visage penché et, évidemment, à cette douceur qui le caractérisait de la tête aux pieds. Et techniquement, il ne peut lui en vouloir. Lui qui avait toujours lu dans ses yeux comme dans un livre. Qui attirait son regard par magnétisme, encore aujourd'hui et sans son cœur lourd de trop de sentiments. Il sent toutes les questions sous-entendues dans ces paroles qui ne prendraient que des nouvelles face à un ami lambda, en temps normal.
Et il sait qu'il est là, à presque craquer, à presque répondre honnêtement.

C'est peut-être ça, qui le frustre. Ca, du moins, qui l'énerve quand ils se voient. Il parle trop, il parle longtemps. Il se libère parfois d'un fardeau à demi-mots sans pour autant oser tout avouer, et puis. Il est soudainement trop tard pour retirer tout ça, alors que le kaze, lui, garde ses lèvres bien scellées. Il ne dit jamais rien, sur lui. Et de toutes ces années d'amitié douces et agréables, Havan et la part lupine qui gonfle la colère dans son cœur de plus en plus souvent ne retient plus que ce sentiment unilatéral de voir en lui une personne de confiance. « I don't need anything. » Mais ça lui tire le cœur, d'ainsi lui répondre. Le froid dans sa voix le tend lui-même, alors que les poings se serrent et que les yeux errent sur ce visage si connu. « You don't need to know everything about me. » Les mots trahissent déjà trop ses sentiments.

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Il avait déjà perdu des amitiés parce qu’il parlait trop peu, mais cette fois il ne l’imaginait pas, s’était persuadé que Havan n’osait peut-être pas avouer des sentiments que Saebyeog avait deviné dès les premiers temps. Se contentait de le voir comme un petit frère et n’avait pas pu le voir autrement mais il n’avait jamais fait exprès de ne pas se confier, pourtant. Les habitudes ont la vie dure. “I don't need anything.” Le ton est sec et fermé, raide, comme lui ces derniers mois, Havan ne s’ouvre pas plus avec la question, marche à reculons. Saebyeog jette un coup d’œil aux poings serrés, à la tension visible. Ouvre la bouche mais n’ose pas parler - pas tout de suite. Préfère le laisser terminer. “You don't need to know everything about me.” Il soupire, hoche la tête doucement. “I suppose, yes. Can I know how you have been doing? It’s been a few months. I didn’t mean to impose myself.” Il regarde les rayons autour d’eux. “Or we can keep it strictly to books, if you’d prefer. There should be someone else that can help you find what you want, if you’re not comfortable with me.” Et il serait triste de l’entendre, mais peut-être que c’est ça, la réalité.

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Il n'arrive pas vraiment à croire en les mots de Saebyeog. Il y a comme quelque chose qui lui échappe, comme une impression qu'il lui glisse entre les doigts autant que lui-même glisse entre les siens. Est-ce le temps? Il a l'impression que les nuits à hurler à la lune créent en lui un creux dans la poitrine. Quelque chose à combler sans que personne ne sache le remplir. Autrefois, peut-être que sa naïveté aurait permis au kaze de le faire. Parce que de cette douceur qui débordait de tout son être, il s'en était repu quand il était plus jeune.
Mais il avait grandi.
Et le ton trahit un certain inconfort alors qu'il répond sur un ton un peu distant. « I've been studying. » Pas besoin de s'étaler, n'est-ce pas? Il n'allait pas le faire, cette fois. Mais quelque chose se serre dans sa poitrine au fil des paroles de son ami. Et il soupire, finalement, cherche son regard simplement pour lui avouer quelques vérités qui ne l'enchantaient pas lui-même. « I don't necessarily want anyone else to recommand me anything. I don't want us to grow appart either and yet you just seem to... Don't really care. About this. About us becoming strangers. Well, I mean, I begin to realize you always were sort of a stranger for me, anyways when you knew everything about me. » Et il n'avait jamais été aussi franc avec lui qu'en ce jour.

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Il y a une distance, patente et visible, que Saebyeog accuse en silence, incapable de lui en vouloir, même s’il n’a pas vraiment compris d’où elle sortait. Cela faisait un moment déjà qu’ils ne s’étaient pas parlé, et avec les semaines, puis les mois, le fossé s’était creusé peu à peu ; il semblait difficile à reconstruire, le sol un peu trop vacillant. “I've been studying.” Saebyeog hoche la tête, se contente de cette seule information. Ne creuserait pas plus loin parce que Havan a tout cadenassé, semble presque sur le point de s’en aller, et même si ça lui fait de la peine, même s’il ne comprend pas tout, il ne peut l’empêcher de rien. Il ne sait pas, en réalité, ce que son (ancien?) ami (petit frère?) désire, ne sait pas s’il faut plutôt qu’il s’éclipse ou qu’il attende quelque chose, sans savoir vraiment quoi. Mais finalement, son regard trouve le sien et Havan s’ouvre, toute en fermeté et douleur. “I don't necessarily want anyone else to recommand me anything. I don't want us to grow appart either and yet you just seem to... Don't really care. About this. About us becoming strangers. Well, I mean, I begin to realize you always were sort of a stranger for me, anyways when you knew everything about me.” Étrangement, l’aveu ne s’écrase pas contre lui en un coup vif et fugace, mais lui fait presque du bien, parce que Saebyeog comprend enfin ce qu’il ressentait, trouve une raison à la distance, au silence et aux tensions. Il baisse un peu la tête, d’un air sincèrement désolé. “I’m sorry you thought I didn’t care, because I do. About this, and about you. I thought you needed some space, because you moved away, but I’m sorry, I should have asked more, showed you I valued our friendship.” Il prend une pause, l’esprit qui vagabonde, se remémore des moments où son silence avait causé de la peine, parce qu’il ne partageait pas grand-chose, par protection ou seulement pour faire briller les autres. Il avait toujours été comme ça, à parler peu de lui, à n’évoquer qu’en passant ce qu’il aimait ou ce qu’il cachait, incapable de montrer à tous l’anomalie-don cachée sous le sortilège. “I have always been discret about my life, not because I don’t trust people but because I’m not really a conversationalist, I would rather listen. I’m sorry it made you feel like you didn’t know me at all. And I know what would comfort you or what you want now, but if you would like to, I can make it up to you,” fait-il avec un petit sourire, d’une main tendue verbalement qui résonne entre eux comme une promesse de faire mieux.

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Il fronce les sourcils en écoutant Saebyeog se confondre en excuses, et, pour une fois, il aurait aimé qu'il s'énerve. Peut-être qu'il s'agace, seulement. Lui explique son propre point de vue, se montre humain imparfait comme lui l'est (en ce moment à fleur de peau, à deux doigts d'éclater à tout moment). Au lieu de ça, il s'excuse. Et c'est lui, qui finit agacé. Il ne sait pas vraiment pourquoi. Peut-être simplement parce qu'il est déçu de voir que l'idée même de se confesser à son ami en tout ce qui pouvait concerner sa vie ne lui venait pas. Comme si recevoir tout un tas d'informations sans jamais rien donner en retour lui conviendrait toute sa vie. « Yeah. You really should've. » Mais Havan se dit qu'il n'a pas le droit de montrer combien ses sentiments prennent le dessus sur lui, en ce moment. Il préfère simplement approuver. Aller en son sens et en celui qu'il avait commencé à glisser sans pour autant en rajouter une couche supplémentaire. Le regard glisse sur la main tendue, puis de nouveau sur le visage de son ami. S'agissait-il d'une proposition sérieuse? Il avait envie d'y croire. Envie de penser que, bientôt il connaîtrait Sae comme lui le connaissait. Ou du moins ferait-il un effort pour que ce soit le cas. Alors il l'accepte, cette main. S'en saisit de la sienne, frisson dans le creux de sa colonne vertébrale (parce que c'est ce qui, autrefois, l'aurait fait rêver : en apprendre plus sur lui, sentiment refoulé). « I just want us to be friends. And not the I'm ranting and you're listening type. That's called being a therapist, not a friend. » Même s'il devrait probablement en voir une. Mais c'était un autre sujet. « I'me not asking you to force yourself out. I just wished we could... Talk. Open ourselves like I used to do. Except I was the only one doing it. If I'm not the good person for you to do that, I don't mind. I'd prefer you telling me this, though. Because I sometimes just feel like you already know all of me when you're becoming more and more of a stranger to me. »

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Il ne savait pas à quel moment la blessure s’était imprégnée dans la peau de son ami, à quel point il avait gardé pour lui la tristesse et le ressentiment. Et même encore maintenant, il a l’impression que Havan ne dit pas tout, garde encore un morceau de rancœur au fond du cœur ; il voudrait le faire sortir, mais il ne sait pas comment. S’excuse à défaut de savoir quoi faire d’autre, parce que demander son pardon lui vient naturellement, parce qu’il s’en veut de lui avoir donné l’impression qu’il n’était pas important, qu’il ne le connaissait pas vraiment. En un sens, Havan avait raison et Saebyeog ne pouvait rien faire d’autre que le reconnaître et lui demander pardon, sincèrement. “I just want us to be friends. And not the I'm ranting and you're listening type. That's called being a therapist, not a friend.” Il ne peut pas s’empêcher de penser ce que Havan ne dira pas, qu’au fond il aurait peut-être aimé autre chose, que dire vouloir être son ami c’est tirer un trait sur une autre possibilité, sur ce qu’il espérait au départ ; sur ces sentiments que Saebyeog a vite compris, cet amour compliqué parce qu’il ne le voyait que comme un petit frère. Et c’était peut-être en partie pour ça qu’il s’était tu, par volonté de protéger ce petit frère comme il protégeait sa petite sœur, parce qu’on ne dit pas les mêmes choses à un ami qu’à un cadet. Et cela même s’il le faisait tout autant avec ses amis, ne s’était jamais vraiment confié qu’à Mini et Ailin. Et dans un sens, ce désir d’être amis le rend triste, parce qu’il aurait aimé avoir les mêmes sentiments que Havan, parce qu’il le connaissait et savait qu’il méritait d’être heureux - d’être aimé. “I'm not asking you to force yourself out. I just wished we could... Talk. Open ourselves like I used to do. Except I was the only one doing it. If I'm not the good person for you to do that, I don't mind. I'd prefer you telling me this, though. Because I sometimes just feel like you already know all of me when you're becoming more and more of a stranger to me.” Est-ce qu’il y aurait entre eux toujours ce plafond de verre, cette impression que malgré la proximité affichée, ils ne pourraient jamais être de parfaits amis ? Il n’en savait rien, mais ce n’était pas ça dont Havan avait besoin, seulement d’être rassuré sur le fait que Saebyeog tenait à lui, qu’il le lui montrait. Qu’il se confiait. “You’re my friend, and I’ve also always seen you as a little brother, which doesn’t mean I don’t want to confide in you.” Il baisse les yeux un instant, regarde sa montre. “My shift ends in half an hour, do you want to go eat something? My treat, and I’ll bore you with facts on me.” Ce ne sera pas le cas, ils le savent tous les deux ; on ne passe pas du silence au one-man show, mais les mots signent au moins une promesse, celle de ses efforts.

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