- Invité
CW et TW
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Tout son être criait. De son épiderme, violacé, jusqu'aux tréfonds de son âme, brisée sous la violence de sa punition. On lui en voulait d'être humain. D'aimer. De remettre en question leurs directives. Ujinori, s'il n'était plus chien, devenait faillible. Et jamais l'armée ne tolérerait que leur plus beau jouet s'abîme. Encore loyal, pourtant, à la cause de ses bourreaux. Mais ce n'était pas assez. Car les braises de la révolte, chaudes et rouges, laissaient présager un désamour futur. Ses réflexions étaient étouffées, noyées. Il ne devait pas réfléchir, mais se contenter d'obéir. Une seule manière de corriger un cabot enragé : le battre. Les coups comme une pluie battante tout du long de ses contours. Jusqu'à ce qu'il en glapisse. Qu'il pleure, supplie. Que tout s'arrête, que plus jamais il ne les décevrait. Satisfaits de leurs exactions, ils s'étaient débarrassés de leur jouet devant chez lui. Une éternité, pour gravir les marches. Se hisser dans son lit. Tout ça pour en conclure que s'il ne se nourrissait pas, tout de suite, il s'en transformerait irrémédiablement en monstre. Et peut-être que c'était ça, leur but, au final. La faim grondait. Il entendait déjà l'hiver, au creux de ses oreilles, le supplier de se nourrir. De supprimer toute chaleur en ce monde. Et régner, au-dessus de ceux qui pensaient le tenir. Qui le tenaient vraiment, mais plus pour très longtemps.
Les doigts pianotaient sur son téléphone, message tapé à celui qu'il aimait. Celui qui le sauverait, un autre soir. Pas celui là. Babylone s'était envolé pour un autre pays. Avait d'autres choses à régler, dans sa vie. Aucune envie de le déranger... Et quelque part, aucune envie de le voir. Ujinori se sentait abandonné. Vivait si mal cette distance, cette absence, quand il était le seul à le faire respirer. Et si ce plaisir, d'inhaler, lui était alors interdit, ne restait donc plus qu'une seule chose à faire : trouver celui qui l’asphyxierait de plaisir. Tout pour mettre sous silence la douleur, et les suppliques de Midori. Le petit prince se laissait porter par la faim, pourtant, au fond de lui, il savait très bien où ses pas l'emmenaient. Là où il ne risquait pas de fauter, car l'irréparable avait déjà été commis, de si nombreuses fois. L'antre du scorpion, au poison si doucereux qu'il s'en serait damné pour y goûter à nouveau. S'y rendre était passé comme une fraction de seconde. Son esprit dans l'incapacité de faire sens du temps et des lieux. Rien d'autre que son objectif. Fendre Minato. Encore et encore. Faire de sa peau son linceul, d'un blanc suffisamment froid pour l'étreindre. Et il était devant sa porte, déjà. Tapait. Une, deux, trois, mille fois. Avait besoin de lui, tout de suite.