face my fears ☼ inhyuk

Quand les yeux papillonnent, Zhilan ne se rend pas immédiatement compte de son état. Ce n'est qu'en se redressant après avoir remarqué qu'il n'avait définitivement pas ce genre de décoration dans sa chambre que ça se ressent : la douleur écrasante dans son crâne, perceuse trop puissante qui scie le cerveau sans merci. Grognement qui s'exclame du fond de sa gorge, il porte aussitôt une main à son crâne, redresse ses genoux contre son corps et y dépose son visage en soufflant bruyamment. Putain. Il détestait les réactions de son corps quand il finissait pas s'écrouler de fatigue. La sensation de faiblesse. Celle de n'être qu'un moins que rien, encore, quand pendant des années il s'était battu pour prouver qu'il avait le droit d'exister (en fluorescences, en cris, en colères et en coups de poing).

Ce n'est qu'après avoir passé quelques temps dans cette position qu'il réalise le bruit qui vient d'en dehors de la pièce, que son regard analyse les environs et que, ah, ça fait tilt dans sa caboche. Et soudainement, les joues s'empourprent d'embarras. Peut-être aussi de colère contre son traître de corps. Il avait perdu connaissance directement sur... Inhyuk, qui venait d'ouvrir la porte et se pointait dans sa chambre, provoquant une réaction réflexe chez le plus jeune qui redressa aussitôt le visage dans sa direction avant de grimacer et reposer son menton sur ses genoux en fronçant un peu les sourcils. « ..Hi. » Qu'il finit par lâcher sans savoir quoi ajouter. Parce que Zhilan ne reste jamais la nuit. Ne souhaite jamais le bonjour à Inhyuk. Ils ne s'aiment que la nuit, n'aiment par ailleurs que leurs corps avant de se briser contre les rivages d'autres bras. Et dans son crâne qui pulse comme si con cœur s'y tenait, il a l'impression que le sang va tout faire exploser. « You let me stay » Qu'il dit comme si ce n'était pas une évidence. Et alors que les mots sortent, il se rend compte que ce n'était peut-être pas volontaire de la part de l'autre. Qu'il s'était imposé dans sa vulnérabilité. Le fait même d'y penser lui donnait envie de fuir (de vomir, par habitué à offrir cette part de lui à qui que ce soit (et ses médecins voudraient certainement connaître cet épisode)). Ce qu'il commençait à faire, par ailleurs, bougeant avec une lenteur qui ne lui ressemblait pas (contrastait avec cette hyperactivité qui bougeait sans cesse chaque partie de son être). « I should leave. Didn't mean to intrude. » Comme s'il semblait être en état pour le faire.

C’est un matin comme les autres, rempli d’une banalité sans nom, aux airs de réunion à distance, de complications sur des riens qui prennent des places de trop. Attentif, Inhyuk regarde un énième rapport déposé sur sa table et écoute des préconisations qu’il a entendu mille fois en buvant un café qui a le goût de tous les jours.
Pourtant, il a fermé la porte de sa chambre.
Jette un coup d’œil à sa montre de temps en temps - il dira que c’est parce que la réunion s’éternise, qu’il a d’autres choses à faire ; certainement pas parce qu’il se demande quand Zhilan va se réveiller ou s’il l’est déjà.
Et c’est vrai, la réunion s’éternise, à tel point qu’il arrête le sort de projection d’un coup sec dès sa fin, avant de se suspendre un instant, comme s’il venait de réaliser son propre empressement et le regrettait. L’esprit fermé (ou bien était-ce le cœur?), il ouvre la porte comme si de rien n’était, persuadé que Zhilan dort encore, assommé par ce mal qu’Inhyuk le voyait le ronger. Et au fond, il ne se laisse guider que par une seule pensée, la laissant surpasser toutes les autres. C’est un matin comme les autres. ..Hi. Sa surprise et sa gêne lui extirpent un sourire et Inhyuk contourne le lit pour ne pas s’imposer, récupérer seulement ce qu’il était venu chercher (un objet, ou bien une réponse aux questions incessantes, grouillantes et insupportables). Inhyuk les fait taire, se force à penser qu’il n’en a rien à faire. Peu importe, si Zhilan est resté. Il s’est évanoui, Inhyuk n’allait pas le laisser sur le pas de sa porte. Il s’en ira bientôt, et tout sera oublié. Slept okay? Mais Zhilan ne parvient pas à faire comme si de rien n’était, perturbé et incapable de passer outre. Il ne répond pas à sa question, comble le silence par l’évidence qu’Inhyuk évitait de verbaliser (à quoi est-ce que ça servirait?). You let me stay. You literally fainted on me, what choice did I have? répond-il d’un air fermé - comme d’habitude, puisque ce matin n’avait rien de différent. Les bras croisés, il observe Zhilan prendre conscience de ce qui s’est passé, utiliser le peu d’énergie qui lui restait pour se redresser, se préparer à s’en aller. I should leave. Didn't mean to intrude. Stop. Le ton est sec, n’appelle aucune protestation. Va dans le sens contraire de ce qu’il venait d’affirmer, plus encore lorsqu’il s’assoit près de lui, la main qui se pose sur son front. Et sans doute que son geste manque de tendresse ; pourtant il y a une certaine douceur dans la pression qu'il exerce, comme une volonté de ne pas le brusquer, ni le briser. You’re still burning up. You’re not going anywhere. Lie down, ordonne-t-il. Et finalement, trompant à la fois le silence et sa volonté de ne pas en savoir plus, il ose ajouter, Does it happen often?

Ce matin est différent de tous les autres. Zhilan aurait aimé se réveiller dans son lit. Ne pas faire face à Inhyuk et ses probables questions. Ses semblants d'inquiétudes qui faisaient fleurir dans la poitrine une émotion nouvelle qu'il préférait sentir pourrir chaque fois qu'il quittait son appartement. Et si l'autre réussit à faire mine de rien, ce n'est pas son cas. S'ouvrir aux autres, laisser percevoir ne serait-ce qu'une touche de faiblesse, ça ne lui ressemblait pas. Ca ne lui faisait pas plaisir. Ca le dérangeait même trop, lorsqu'il ne se sentait pas légitime de laisser ses problèmes de santé s'étaler sous les yeux de ceux qui ne devraient pas s'en soucier. Mais Inhyuk vient déposer sa main pour prendre sa température et le souffle s'arrête une milliseconde avant de reprendre chaotiquement, tentant de feindre l'indifférence. Grognement qui remonte un peu mais, ah, qu'il est aisé de suivre les ordres de l'autre. Il s'allonge, le regard glisse sur le corps du plus âgé et il ramène ses mains vers sa poitrine comme pour se protéger de ses propres pensées en bataille. « You could've wake me. » Qu'il dit comme pour affirmer qu'il ne l'avait pas fait. Mais il ne pousse pas le bouchon. N'a aucune volonté de se faire jeter maintenant. Pas alors qu'il semblait si ouvert à des discussions qu'ils n'avaient jusqu'alors jamais eues. Parce que ce n'était pas leur genre. Parce qu'après le sexe, ils n'étaient plus rien. Zhilan bat des cils à la question. Pas certain qu'il s'intéresse véritablement à la réponse. Pourtant, il aimerait que ce soit le cas, pour une fois. « Not really. Just when I'm not careful enough. Or when my body decides to be fucking weak for no reason. » Et même si le temps passait, Zhilan n'appréciait toujours pas cette part fragile de lui-même. Parce que cela ne reflétait pas ce qu'il était. Parce que depuis si longtemps, il se bat pour ne pas être la petite chose à protéger (mais le destin se foutait bien de sa gueule). « I'll be fine soon. »