,, the pact ft. anzu

L'air frais matinal caresse les joues du jeune homme tandis qu'il ouvre le volet principal de la boutique. Un bâillement étire ses traits, les cernes comme preuve que la nuit fut longue. Le problème avec ce couvre-feu, c'est que m'homme perd de l'argent, et des heures de sommeil. Celles-ci pouvant être exploitées à bon escient par le travail, deviennent soudainement des heures d'insomnie et cauchemars à répétition. Myeongho regarde sa montre et passe sa main sur le visage, déjà épuisé par la journée. Après un soupir, les nombreuses préparations s'enchainent comme un automatisme inné : sortir les pâtisseries, chauffer les machines, passer un petit coup d'éponge sur les quelques coins visibles et le tour est joué. Très vite, les premiers clients - étudiants et professeurs - passent la porte. Très vite, l'adrénaline du travail coule dans les veines du sorcier, et celui-ci affiche son plus beau sourire. Des petites discussions matinales, les habitués cherchent eux aussi à se motiver pour faire face à cette énième journée d'angoisse ; les annonces sur les eaux et leurs créatures ne rassurent pas la population. Mais Myeongho, il est là pour réchauffer les coeurs. Il est là pour déposer un bon chocolat chaud, avec un petit gâteau offert et faire le clin d'oeil du beau garçon. On appelle son nom à droite, à gauche, il se rend disponible pour rendre service au mieux. Tant qu'on le sollicite, tant qu'il ne se retrouve pas seul face à lui-même, tout va pour le mieux.

C'est au bout de deux heures, les mains enroulés dans un torchon fraichement séché, qu'une silhouette entre dans le café. En premier lieu, le coréen n'y porte pas grande attention, trop occupé à nettoyer le comptoir et les machines. Mais les pas se rapprochent et il se voit obligé de se retourner, le sourire aux lèvres. Quelle n'est pas sa surprise quand il croise le regard d'une connaissance - souvent croisée en soirée, peut-être mentionnée par sa tendre amie d'ailleurs, la mine renfrognée de Anzu épie ses faits et gestes. Ah, sans doute un lendemain de soirée. Cette demoiselle qui trouve le temps de s'amuser d'une telle intensité ! Myeongho, pourtant adoré par beaucoup de personnes, ne se rend pas si souvent à ces réunions alcoolisées. Déjà parce qu'il a un toit et des études à payer, mais aussi - et surtout -  parce que son masque de papillon social n'est pas si solide que ça. Une goutte d'alcool en trop, et peut-être qu'une vision lui fait perdre le contrôle. Mieux vaut ne pas tenter le diable.
Si sa personnalité peut se fragiliser en temps de grosse fatigue, il n'empêche que le jeune homme adore emmerder. Et Anzu fait partie de ses meilleures victimes. Sa main vient s'écraser dans un bruit sourd devant la brune, les iris brillants. « Bah alors ?! » Sa voix porte assez pour que le résonnement dans la tête d'un ivrogne soit redoutable. Ici, en l'occurrence, la demoiselle est une ivrogne. « Comment ça se fait que j'te vois aussi tôt ? Tu viens pas avant 14h d'habitude. » et le rire jovial, malice dans ce regard tandis qu'il s'active pour préparer le café le plus serré possible. Le mug est large, les shots sont versés - le plus âgé utilise son savoir-faire pour tout de même aider Anzu. « Tu veux un truc à manger avec ? J'ai de quoi de remplir sans t'écœurer. » le ton est plus faible, empathique, pour finalement redevenir égal à lui-même. « Cherche pas à déboutonner mon pantalon, c'est déjà vidé. Mais tu peux jeter un oeil aux salades de fruits. »

le couvre feu imposé depuis quelques mois n’était qu’une épine dans le pied d’anzu, qui devait ruser pour s’adonner à son activité favorite : brûler la vie par les deux bouts à grand renfort d’alcool et autres substances inflammables. malheureusement les tempêtes et autres inquiétudes imbéciles l’empêchaient d’être un cocktail molotov à temps plein, de sortir donc… cela dit, la jeune femme ne pouvait pas cracher sur une chose : les gueules de bois étaient bien moins régulière. impossible de repousser toujours plus ses limites lorsqu’elle risquait plus gros que quelques remontrances et regards désapprobateurs. et elle commençait presque à apprécier le plafond de sa chambre qu’elle passait des soirées entières à regarder en s’abrutissant en fumant des joints plus long que son avenir. ainsi ce matin l’étau qui serrait son crâne était presque supportable. rien qu’une paire de lunettes réfrigérantes  et un café (trop) sucré ne pourrait faire partir.

trois cigarettes plus tard, elle passait les portes de son fief caféiné. l’établissement ne proposait pas les meilleurs cafés de l’archipel mais anzu y avait pris ses habitudes et connaître la carte sur le bout des ongles avait un avantage : pas besoin de réfléchir avant de passer commande. surtout lorsque l’un des baristas était un ami, un ami qu’elle songeait sérieusement à rayer de la liste. elle fronça les sourcils derrière ses lunettes quand il parla, pour ne pas changer, beaucoup trop fort. une agression familière à laquelle elle refusait de s’habituer et qu’il ne lui fasse pas croire que ce n’était pas fait exprès. “je suis une femme pleine de surprise que veux tu” et lui était un homme mort s’il continuait de montrer autant d’entrain de si bon matin. c’était presque indécent cette débâcle de bonne humeur avant midi. “à cette heure-là j’me nourris que de café et de crème fouettée. mets la dose stp.” anzu ne buvait ses cafés que si chaque gorgée risquait de lui boucher les artères entre la crème et le sucre. un drame pour les véritables amateurs de cette boisson, encore d’autres convenances dont la jeune femme se moquait royalement. elle grimaça et baissa ses lunettes sur son nez pour que myeongho puisse pleinement profiter du mépris dans son regard. “garde ton pantalon sur tes hanches, y a des choses que j’veux pas voir de bon matin.” si d’ordinaire elle sautait sur toutes tentatives de flirt, que ce soit une blague ou avec de réelles intentions, ce n’était pas encore l’heure. et le jeune homme n’avait pas ce qu’il fallait pour la faire émerger. “je préfère les gros seins au p’tit dej.”

le soupir en voyant que anzu n'a toujours pas changé. en même temps, il s'attend à quoi en voyant la même gueule flétrie par l'alcool les lendemains de grosses soirées ? myeongho lève les yeux au ciel avant de reprendre la tasse soigneusement soignée et de sortir la bombe chantilly. « faut du salé le matin, sinon tu tiens pas l'aprèm. » dit-il en enchainant les spirales de crèmes empilées sur la boisson. si leur relation tient notamment sur leurs échanges passifs-agressifs, il en convient que le barista éprouve un minimum de pitié pour la jeune femme. sans mépris, évidemment, l'homme sait pertinemment - grâce à ses études - qu'une vie aussi agitée cache bien des secrets, le plus souvent refoulés. mais ! ce ne sont pas ses affaires, alors le brun ne peut que rigoler face aux rétorques de l'autre. « bouffe-tétés va. » pouffe-t-il en s'accoudant au comptoir. « tiens j'te mets un croissant et un sandwich au thon, comme ça t'auras de quoi rendre dans la journée. » aussitôt dit, aussitôt sont emballé les produits, avec une habilité prouvant de ses années d'expérience. « dommage que personne d'autre ne puisse te supporter le matin, t'aurais peut-être même accès à d'autres chances pour t'aider et te donner plus de sucre. » mouvement de serviette s'enroulant sur l'épaule, et le brun sourit. « mais bon ! » petit coup sur la machine à café avant de finalement se poser devant anzu - aucun client à l'horizon, il a quelques instants pour taper la discute. des regards inquisiteurs, surtout féminins, se posent sur myeongho tandis qu'il concentre son attention sur la jeune femme. « t'étais où hier d'ailleurs ? » les souvenirs de la veille, insomnie comblée par les réseaux sociaux, reviennent comme un éclair en temps d'orage. « j'ai cru te voir dans la story de jordan ? ou alors j'ai rêvé... quoique, la meuf avait un gros boul, c'était pas toi je pense. » avec un haussement d'épaules, le coréen se redresse pour préparer une commande externe, le sourire aux lèvres. oui, c'est son passe temps favori d'emmerder ses connaissances.