nothing's gonna hurt you baby (babylone)

14.02.23 — @babylone bird

nothing's gonna hurt you baby

Elle se glisse entre les invités, désormais seule. Atlas l’a abandonné en même temps qu’elle, au moment où son regard avait croisé celui de Dahm. Il n’avait pas fallu longtemps avant qu’elle ne quitte la salle principale pour un endroit plus secret, rejoignant le raiyo-ka ; et quand elle s’éclipse des toilettes, quelques minutes après, son maquillage vient d’être peaufiné et rien n’y paraît. Personne ne pourrait deviner qu’elle vient de tromper son amoureux, celui des caméras en tous cas. Le cœur battant, Pandore a un sourire aux lèvres et la respiration encore un peu lourde, saturée par l’effort, le plaisir, la satisfaction. Mais évidemment, le ciel a beau être calme et ensoleillé, on ne sait jamais quand la tempête va arriver. Pandore a pourtant l’impression d’avoir survécu à un nombre déjà trop grand, quémande un peu de paix. Mais la météo est capricieuse, se rit de ses désirs pour n’en faire qu’à sa tête, amusée par ce qui se prépare.
Parce qu’elle ne voit pas Atlas, évidemment, dans la foule. Ses yeux en croisent d’autres, qu’elle a si peu de mal à reconnaître alors qu’ils sont portés disparus depuis des mois, non, éloignés de force - même si elle regrettait cette décision tous les jours. Elle aurait voulu que les choses se passent autrement, ne pas avoir à s’éloigner pour le protéger, ne pas devoir lui dire au revoir sans échéance, un adieu qui ne dit pas son nom. Ils se regardent, et ça dure suffisamment pour que les mots n’aient pas besoin d’être échangés, même de loin. Et elle va pour s’approcher, est sur le point de le rejoindre en quelques pas pour le retrouver, ne serait-ce que pour une soirée (elle leur dira pouce, elle leur dira que ça ne comptait pas, que ce n’est personne), mais elle s’arrête, soudainement. Parce que Babylone n’est pas seul, au bras d’une autre silhouette qu’elle ne connaît que trop bien. Les yeux de Pandore s’écarquillent, la tension qui chute et le cœur qui ne sait plus s'il faut accélérer le mouvement ou bien s’arrêter, comme elle. Et il ne peut que la voir, son expression passer du tout au rien, son teint qui blêmit, même de l’autre côté de la pièce. Ce n’est pas encore assez fort, la réalité c’est que Pandore devient livide, les pensées en surchauffe. Pourquoi lui ? Pourquoi lui prend-il le bras comme si Ujinori était un enfant de chœur, une présence acceptable, un compagnon adéquat ?
Et en même temps, elle ne peut rien dire. Parce que Babylone ne sait rien, parce qu’elle s’est promis de ne rien lui dire, outre la menace pesant sur elle depuis son retour. Elle lui a caché l’enfer dont elle voulait le protéger en s’éloignant, ne pouvait se résoudre à lui raconter, les laboratoires, les expériences, mais
Mais elle ne sait pas ce que cette proximité veut dire et est trop confuse pour penser correctement, pour chercher le rationnel et combler les questions qui la submergent. Est-ce qu’il sait déjà ? Est-ce qu’il travaille aussi pour eux ? Est-ce que lui aussi l’a trahie ?
C’en est trop. Pandore quitte la pièce en se faufilant entre les silhouettes, la gorge sèche et les poumons qui manquent d’air. Elle ne peut rien dire, mais les mots ne sortiraient pas, de toutes façons, seraient bloqués. Il lui faut de l’air, vite, il lui faut s’en remettre, si c’est même possible. Il faut combler les questions sans réponse par du silence, du calme, un peu de vent frais. Elle finit par parvenir au parc, s’adosse contre un arbre, contre quelque chose, n’importe quoi, l’esprit qui profite du silence pour compenser le tumulte des pensées. Comme quoi, le ciel a beau être bleu, la tempête ne met pas longtemps à se déclarer.

14.02.23 — @Pandore Águilar

nothing's gonna hurt you baby

Babylone vit sur un nuage. Une impossibilité qu'il n'aurait jamais envisagé jusqu'alors, sinon lorsque Ujinori lui-même lui avait proposé de l'accompagner à ce bal. A son bras. En public. Et si l'angoisse avait monté au début de la soirée, maintenant, il était plus que ravi de se pavaner au bras de l'aimé, se présenter contre lui. L'embrasser face à tout le monde sans se dire, ah, que c'était peut-être de trop. Qu'ils n'étaient pas encore prêts à ainsi se présenter. A présent qu'ils avaient pu discuter et mettre un terme sur leur relation, le raiyo-ka avait l'impression que le cœur était plus léger. Déchargé de ses inquiétudes (de cette peur immense qu'il avait de le voir aller se nourrir au creux des lèvres d'un.e autre pour satisfaire le froid qui l'habitait). Mais dans la foule des regards qui, parfois, s'accrochent au sien, il y a celui de Pandore. Vagabonde dans la poitrine et dans la salle, elle a tôt fait de croiser son regard et de fuir. Et pour la première fois depuis longtemps, il a le sentiment qu'il doit la poursuivre. Il n'a pas le temps de s'expliquer à son aimé, glisse un baiser sur ses lèvres, quelques excuses de retrouver une amie et se faufile à la poursuite de la jeune femme.

Il a l'impression de chasser un fantôme de son passé, Baby, lorsqu'enfin il se trouve assez proche pour discerner la silhouette de Pandore. Le regard glisse sur les tremblements de son corps. Il a envie de dire quelque chose. De s'exprimer sur ce qui comprime la poitrine avec tant d'intensité. Mais rien ne lui vient, les mots semblent vides. Ne font plus aucun sens, alors que la gorge, sèche, cherche à s'exprimer sous les souffles de la cadence de ses pas. « Pan'... » Qu'il murmure et ça sonne à peine assez fort pour qu'elle l'entende. Il a le souffle court, quand les regards se percutent. Ne sait quelle excuse donner pour l'avoir suivie. C'est qu'ils s'évitent si bien, depuis tant d'années. Alors pourquoi revenait-il, tellement désespéré? Il avait vu dans ses yeux une trahison de laquelle il n'était pas coupable. Mais il ne pouvait pas mettre le sujet si simplement sur le tapis. Qu'avait-il fait pour la blesser, ce soir? « I'm- Hey. » Sans savoir quoi ajouter. Il se tient, bête.

14.02.23 — @babylone bird

nothing's gonna hurt you baby

Les regards l’ont confrontée à leur bonheur, et c’était peut-être ça le pire. Pandore sait à quoi ressemble une joie feinte, elle est même l’une des mieux placées pour le savoir, mais ce n’était pas ce qu’elle avait vu, pendant le court instant où la réalité l’avait forcée à les voir ensemble. Babylone ne faisait pas semblant d’être heureux à ses côtés. Et ça ne fait que lever d’autres interrogations, qui s’ajoutent à toutes les autres restées sans réponse ; elle est persuadée que ce n’est pas ce soir qu’elle pourra les faire disparaître, d’ailleurs, parce qu’elle se refuse toujours à dire la vérité à son ancien ami. Ne peut se résoudre à briser les mensonges qu’elle doit garder pour les autres, même si c’est lui. Non, surtout si c’est lui. Elle ne peut que s’enfuir, aller prendre l’air en se disant que ça passera, qu’il n’y a pas de raison pour eux de se croiser à nouveau. S’appuie contre un arbre en fermant les yeux, en espérant retrouver le calme, seulement heurtée par le silence assourdissant des questions sans réponse, qui prennent un malin plaisir à s’enchaîner dans son esprit.
“Pan’…” Elle ouvre les yeux, d’un coup, pour trouver les siens. Il l’a suivie, emmenant sa soirée dans une direction qu’elle n’avait pas prévu ni qu’elle désirait. Parce que maintenant, elle ne peut plus vraiment s’enfuir et faire comme si leurs regards ne s’étaient pas croisés. Difficile de faire semblant quand la réalité nous confronte au passé, de manière aussi brutale et douloureuse. Elle serre les dents, interdite ; le regarde comme si elle ne le connaissait soudain plus, parce que c’est un peu le cas, vu tout ce qu’elle ne comprend pas. Peut-être qu’il est comme Ujinori et peut-être qu’elle avait tort d’avoir voulu le protéger en s’éloignant, parce que lui-même fait partie de kaisei ? “I'm- Hey.” Elle doit choisir, comment se situer ; et elle voudrait tant faire semblant, lui demander comment il va en ignorant tout ce qui vient de se passer, faire comme si elle n’avait rien remarqué, qu’il n’y avait rien à remarquer. Mais c’est trop tard, ce serait trop évident, il lit sur ses traits l’imbroglio d’émotions que les voir tous les deux a fait surgir. Ne les comprend sûrement pas, puisqu’il ne sait rien. Babylone se retrouve comme elle avec un tas de questions sans réponses sur les bras et une ancienne amie refusant catégoriquement de lui apporter des réponses. Finalement, elle s’écarte de l’arbre, prête à prendre du recul, un peu sur la défensive, prête à poser une question décisive, bien éloignée du small talk qu’elle aimerait lui donner. Méfiante et tout aussi loin de la confiance qu’elle lui accordait l’instant d’avant. “Do you work for kaisei?” La question peut sembler étrange, parce que Pandore la pose comme si elle allait lui reprocher une réponse positive, alors que pour lui, elle-même est affiliée à kaisei. Que pour quelqu’un qui ne sait rien, travailler pour kaisei en ferait un allié, pas un ennemi. Et s’il répond oui, alors elle pourra le laisser, rester éloignée. Le mettra dans la même catégorie qu’Ujinori et s’attachera à le détester, petit à petit.

14.02.23 — @Pandore Águilar

nothing's gonna hurt you baby

Il sent toute la retenue qui abrite la jeune femme, là, blottie contre l'écorce d'un arbre sans savoir s'en défaire. Comme si ça allait la protéger du regard presque trop doux que Babylone lui lançait. Il a le souffle un peu court, comme s'il regrettait d'être venu jusque là pour lui parler. Comme s'il réalisait un peu trop tard qu'il aurait dû réfléchir un peu plus avant de se jeter à ses trousses comme il l'aurait fait auparavant. Mais il n'était plus temps de faire demi-tour. Juste de rester planté là, de la regarder sans savoir quoi attendre ni à quoi s'attendre. Il y a un silence durant lequel il se demande même si elle se décidera à lui parler. Elle ressemble à l'un de ces animaux blessés qui attendent leur mort face au dernier geste du chasseur à leur encontre.
Et il ne sait pas vraiment s'il lui a déjà tiré dessus.

Elle s'écarte de ce qui la protège, elle et ses sentiments. Et elle s'éloigne de lui comme s'il était capable de la brûler, quand ses flammes n'avaient de dangereux que sa propre peau ardente sous leurs illusions grandioses. Le souffle se coupe en voyant combien elle a peur de lui. Et il se demande s'il est devenu un monstre sans s'en rendre compte. Les pieds culbutent dans son dos, alors que lui-même cherche à prendre ses distances. La voix de son ancienne amie semble distance. En sourdine car la question ne fait pas sens. Il hausse les sourcils, regarde par-dessus son épaule comme si elle avait pu demander à n'importe qui d'autre. Mais pas à lui. Elle travaillait pour kaisei. Pas lui. La situation inverse ne devait-elle pas se dérouler? Confusion visible sur son visage, il repose le regard sur le visage de la hiisa-ka, question sur le bout des lèvres. « What are you talking about? » Qu'il demande, semblant soudainement se ressaisir de sa précédente perte de moyens. « You work for them. If I did... We would be friends, still. » Simple réponse qui rappelait la raison pour laquelle cela faisait bien trop longtemps qu'ils ne s'étaient pas adressés la moindre parole. Il déglutit et secoue la tête. « Is this your way of telling me to get back before someone sees us or what? »

14.02.23 — @babylone bird

nothing's gonna hurt you baby

Elle marche à tâtons mais chaque pas lui brûle un peu plus les pieds, la peau nue sur des charbons qu’elle a elle-même embrasé. Elle persiste à refuser de trop en dire, se sent incapable de tout lui avouer, parce que ça voudrait dire qu’elle revient en arrière, après des mois à s’être éloignée. Que ça n’aura servi à rien, parce qu’elle aurait pu tout lui dire avant de se décider à le protéger par sa distance, parce qu’elle aurait pu se confier. Elle sait qu'il aurait gardé le silence et elle n’aurait pas eu à dire au revoir à un autre de ses proches. Elle les accumulait, ces adieux imposés, et ça lui était de plus en plus insupportable. Le poing serré, Pandore se retrouve à regarder Babylone avec la peur d’un animal en situation de danger, aurait aimé éviter cette confrontation. Mais encore une fois, Ujinori la lui avait imposée, s’était immiscé dans la vie de quelqu’un qui méritait bien mieux. Et ça non plus, elle ne pouvait pas le supporter.
Elle ne quitte pas son ancien amant et ami des yeux, se sent un peu soulagée lorsqu'il fait quelques pas en arrière - et si elle aimerait qu’il reparte dans la salle de bal, elle ne peut s’empêcher d’apprécier qu’il reste là, comme avant, le cœur toujours plein de regrets de l’avoir laissé.
Il ne comprend visiblement pas sa question, en tous cas rien sur son visage ne trahit l’assurance qu’elle avait pu voir au creux des prunelles d’Ujinori. Ça la rassure ; ce n’est pas suffisant, parce que ça ouvre d’autres portes, d’autres bouteilles vont devoir être envoyées à la mer, ça crée d’autres inquiétudes, mais Pandore sait au moins qu’elle n’aura pas à détester une nouvelle personne, ce soir. “What are you talking about? You work for them. If I did... We would be friends, still.” La vérité heurte leurs deux cœurs en même temps, comme un poignard dans une plaie qui n’a jamais cicatrisé, ni pour l’un, ni pour l’autre. Pandore s’en veut, terriblement, même si elle sait qu’elle n’avait pas le choix - elle ne l’a jamais, c’est bien ça, le problème. “I…” La phrase ne se termine pas, meurt dans le silence. Les mots ne suffiraient pas, puisqu’elle ne peut pas répondre à l’entièreté de ses interrogations, ni ne peut rattraper le temps. Ils se sont déjà perdus, rien ne dit qu’ils pourront un jour se retrouver, pleinement. Et sa relation avec Ujinori ne fait que mettre en danger cette protection qu’elle s’est attachée à instaurer, quitte à sacrifier ses propres sentiments. C’est hors de question. “Is this your way of telling me to get back before someone sees us or what? No,” répond-t-elle aussitôt, instinctivement. Ce n’est pas une véritable réponse, plus un refus qu'il rentre, une réminiscence de l’amie qui n’a pas envie de se retrouver seule à nouveau - même si le moment ne durera pas et même s’il reste des questions douloureuses à soulever.
Pour la première fois, Pandore fait un pas vers lui. N’a aucune idée de comment il va prendre ce qu’elle s’apprête à énoncer, mais elle ne peut imaginer le laisser en paix avec un monstre. “I know you don’t really have any reasons to trust me right now, and that you don’t understand why I asked that, among other things, and I can’t really explain, but-” Elle s’interrompt, hésite, les dents qui se mordent un peu les lèvres et les doigts qui se triturent les uns les autres. “you shouldn’t be with him, he’s… I know him, I’ve known him for a long time, and he’s not a good person, Babylone.” Et peut-être qu’il aura l’impression qu’Ujinori n'a rien à voir avec le sujet de leur conversation, mais la réalité c’est que Pandore aimerait qu'il reste ignorant. Moins il en sait, mieux il peut être protégé.

14.02.23 — @Pandore Águilar

nothing's gonna hurt you baby

Pandore tente de parler et ça meurt dans sa gorge. Elle laisse les mots s'échouer sur le bord de ses lèvres et ça fait tambouriner le cœur dans la poitrine tant Babylone ne comprend pas où cette situation peut les mener. Que représente-t-il, aux yeux de son ancienne amie ? Quand elle lui répond avec l'assurance qu'il ne lui avait jusqu'alors pas trouvé ce soir, il sursaute presque tant la réponse est venue rapidement et avec un naturel qu'il ne soupçonnait pas. Comme si, au final, elle avait su ce qu'il allait dire depuis le début. Mais il en comprend qu'elle ne souhaite pas le voir partir. Pas maintenant. Et quelque part, ça soulage. Ca apaise et ça enlève un poids de ses épaules, une certaine tension qu'il ne pensait pas porter sur lui et qui, pourtant, était plus que présente.

Elle s'approche, et il a l'impression qu'on lui cloue le bec en un seul mouvement, alors qu'elle n'a même pas encore commencé à parler. Mais elle rectifie très bientôt la chose. Il ne s'était pourtant pas attendu à la suite des mots de Pandore, et les yeux s'ouvrent tous grands. Il ne prend que peu de temps à comprendre de qui elle lui parlait : Ujinori, bien évidemment. Qui d'autre pourrait bien jouer le rôle du grand méchant loup ? Il a en souvenir cette vision de l'enfant apeuré, qu'il avait vu dans le songe de l'amant. Lui, et puis ceux qu'il avait blessé. Il avait pourtant vu en Ujinori plus qu'un tortionnaire. Plus qu'un homme froid et distant, comme l'on aimerait le qualifier. Peut-être était-ce lui, qui avait fait fondre la porte. Toujours était-il qu'il avait vu les parties les plus douces de son compagnon et que, au courant de ses méfaits bien que pas en profondeur, il ne lui en avait pas tenu rigueur. S'il en avait été terrifié, fut un temps, le roi des glaces n'avait jamais rien fait pour le dénoncer, lui, et il avait espoir qu'il commence peu à peu à se faire à l'idée d'aider la cause des ronin plutôt que de s'allier à leurs tortionnaires. « I... know. Sort of. » Il souffle, laisse les mains retomber de part et d'autre de son corps pendant une seconde, évitant le regard de Pandore avant de se passer une main sur le visage, dans ses cheveux. « Well, I don't know everything but I know some things. » Il grince un peu des dents, fronce les sourcils et se décide finalement à recroiser le regard de Pandore. « I know him, too. And I know he's getting better. He's doing better than he used to. »

14.02.23 — @babylone bird

nothing's gonna hurt you baby

Son esprit ne sait quoi en faire, de l’ensemble de ces questions que leurs étranges retrouvailles font surgir. Pandore attend des réponses sans oser l’interroger à voix haute, voudrait presque qu’il parvienne à deviner ses pensées ; elle n’aurait pas à prononcer des mots terribles, à devoir, même pour un instant, se replonger dans des souvenirs traumatiques. Lui parler de ce qui avait causé leur séparation, verbaliser l’enfer qu’elle avait vécu. À la place, elle espérait depuis des mois qu’il comprenne de lui-même, tout en ne le voulant pas, obstinée dans sa protection. Elle maintenait que son ignorance allait garantir sa liberté, qu’en ne sachant rien et en étant loin, il n’aurait pas, lui aussi, à traverser l’enfer.
Mais elle sait, qu’à ses yeux, tout ça ne fait aucun sens, voire suggère des scénarios dont elle abhorre l’existence. Pandore se retrouve bloquée par son propre silence, la gorge nouée et une main qu’elle refuse de tendre, mais qui la démange, parce qu’il ne mérite pas d’être gardé dans l’ignorance. Il lui en voudrait, s’il savait - non, il lui en voudra, quand il saura.
C’est inévitable, et Ujinori n’a fait que précipiter les choses, qu’accélérer le destin. Mais malgré tout, Pandore ne peut pas se résoudre à tout lui expliquer, clairement et verbalement, d’autant qu’elle ne sait pas ce qu’Ujinori lui a dit. Peut-être qu’au fond, il est déjà trop tard, que Babylone est au courant, peut-être qu’il consent ; peut-être que ce qu’elle pensait être un au revoir était un adieu, parce que désormais il est des leurs. Les peut-être s’ajoutent aux questions et la font trembler, dans le froid d’un parc qui ne semble accueillir que leurs deux silhouettes.
Ce qu’elle lui donne est maigre, insuffisant. À la surprise qui se dessine dans ses iris, celles de Pandore répondent par un espoir impulsif et instinctif ; elle a l’impression, rien que pour un instant, que Babylone pourra être convaincu, au moins par une partie de la vérité, et s’éloignera d’Ujinori.
Mais ça ne dure pas. “I… know. Sort of.” Elle se fige, les muscles tendus, à nouveau galvanisés par la peur. Prête à reculer, faire un pas en arrière quand elle vient d’en faire trois vers l’avant. Il semble le remarquer, parce qu’il corrige, les yeux pourtant toujours loin des siens, incapables de les affronter. “Well, I don’t know everything but I know some things.” De la surprise, Pandore passe à l’attente, nerveuse et angoissée ; elle attend des détails qu’elle-même n’était pas prête à lui donner, se refusait à le faire. Elle voudrait tout savoir, en un instant, de ce qu’Ujinori a bien voulu lui partager. Avait-il parlé d’elle ? Comment aurait-il pu ? Il ne savait probablement rien de sa relation avec Babylone. Quand leurs regards se croisent à nouveau, elle cherche ce qu’elle ne trouvera pas, une vérité silencieuse, une explication mentale, un indice de ce qu’il sait (mais surtout de ce qu’il ne sait pas). “I know him, too. And I know he's getting better. He's doing better than he used to.” Mais la seule réaction que ces mots lui inspirent, c’est un rire impulsif, jaune et mauvais, qui marque son scepticisme. “I don’t believe it for a second.” Elle ne peut pas en dire plus, ne peut pas lui avouer une offense que Babylone ne comprendrait qu’à moitié. Ne peut pas lui dire qu’Ujinori est celui qui l’a dénoncée, puisqu’il ne sait pas ce qui s’est passé, après, pourquoi ça fait de lui un monstre duquel elle voudrait l’éloigner. Mais au-delà d’Ujinori, une fois passées la colère, la surprise, elle se retrouve plus ou moins à la case départ, incapable de savoir si Babylone a fait les liens que le destin lui offrait, a pu comprendre pourquoi son amie s’était éloignée, sans un mot, déchiffrer ce que son attitude criait à ses proches depuis son retour aussi étrange que son absence. Elle fronce les sourcils, les bras croisés et les mains qui saisissent sa peau, comme si elle avait froid, gagnée par l’anxiété et les souvenirs - elle a presque l'impression que ses cicatrices, même masquées par les pierres précieuses apposées par kaisei, sont plus visibles que d'habitude, devenues évidences, preuves silencieuses et douloureuses. “Does that mean…” Elle ne termine pas ce qui a plutôt l’air d’une question rhétorique, plonge ses yeux dans les siens, pas vraiment prête à se confronter à sa vérité. “What do you know?” Et derrière celle-ci, Pandore espère qu’il saisira ce qu’elle ne peut se résoudre à lui dire, la question au centre de tout. Do you know what I’ve been through and what I’m trying to protect you from?