café voyance ; erin & niccolò.

elle affichait une mine blasée sous la tente, éloignée de la lumière pour retrouver celui d’un coucher de soleil artificiel. même année où en laissant de côté qu’en était enregistrée sogaka, cela pouvait incomber des responsabilités qu’on lui proposait et qu’elle pouvait aisément ignorer, mais elle s’y refusait. son rôle de déléguée qui n’avait absolument rien à voir dedans qui pesait curieusement sur ses épaules, alors elle concédait pour deux ou trois heures. pas que les regards de curiosité posés sur elle une fois à l’oeuvre ne lui avait pas donné un peu envie, avide d’attention en position de pouvoir. et elle pourrait le raconter à ses tantes, pour qu’elles lui foutent la paix pour le reste de l’année. faut dire qu’elle le pratiquait pas vraiment, qu’elle n’était pas excellente mais ça, personne n’avait besoin de le savoir.

un bâillement s’échappe, les prunelles examinant ses ongles à refaire, attendant patiemment que les heures passent face à la chaise vide. laisse les cartes volées devant elle, laisser en décor mais qu’elle ne précisera pas aux intéressés. son regard finit par se fixer sur une ombre qui se mouvait dans la pénombre, ombre qui devint une silhouette, silhouette qui devint l’incarnation de ses problèmes. yeux écarquillés à regarder à côté pour voir s’il y avait d’autres sogakas de libre, il y en avait mais la silhouette en mission du ranieri allait tout droit, jusqu’à elle. fuckkkkfuckfuckfuck. erin reconnaissait ce sourire, ça voulait dire des problèmes. trop tard, il fallait régler ça alors elle lance les cartes sur la table et lui offre son plus beau sourire hypocrite, et elle voulait qu’il le voit. « hi ranieri ! no need to sit down, i just read your cards. you have no future, no prospects, and you will die alone. 500 damas. » tend la main avec ce même sourire, parce qu’elle pouvait bien lui soutirer un peu d’argent dans sa souffrance.

niccolo s'ennuie. petit gamin amoureux du pouvoir déteste son rôle de délégué quand il n'est pas celui de leader ou de compétiteur. certes, il se plaît à jouer les figures dominantes, le modèle que les premières années doivent suivre, mais son rare plaisir est assassiné par les longues journées où il est réduit à un banal surveillant. pour le tokidai, le voici superviseur des activités proposées par sa maison avec ses deux compères. lui ne rêve que d'une pause cigarette alors que les stands continuent à être pris d'assaut par leurs camarades. c'est gaia qui s'aperçoit en premier de l'impatience de son alter-ego et lui assure qu'ils se débrouilleront sans lui quelques instants. libération. sans attendre, l'italien disparaît et trouve un endroit isolé où fumer. alors qu'il défile les profils sur elixir d'un air las, il entend quelques éclats de voix non loin.

le bel rejoint les festivités et se retrouve sous la tente du café voyance. l'ambiance est opposée à celle, lumineuse et joyeuse, du dehors. ici, tout est sombre et chaud, plutôt calme. cette grande solennité lui arrache une sueur froide, mal à l'aise à l'idée d'être dans un environnement qu'il ne maîtrise pas. eurk. il allait se retourner à son royaume quand au loin, il aperçoit la silhouette de celle qui hante ses plus doux rêves. erin. et... elle est seule. un large sourire aux lèvres et tout prédateur qu'il est, l'héritier ne met que quelques secondes à combler la distance entre eux. il n'est pas déçu quand, en introduction, elle se fait toute grande et joue les hypocrites. il aime ça. lui en profite pour attraper la main qu'elle lui tend et y déposer un baiser. niccolo fait ça avec douceur, sans jamais la quitter des yeux. « i'm happy to see you too. » lui chuchote t-il, rien que pour elle. à côté d'eux, une jeune étudiante rougit d'avoir été spectatrice de cette scène intime offerte par le suisei à leurs pairs sous la tente. et puis, satisfait, nicco finit par s'assoir en face de l'américaine sans lui en demander l'autorisation. « can you read again ? i'm pretty sure you are in my very near future. like tonight. »

elle pense avoir trouver la parade pour s’échapper, une issue de secours c’était tout ce qu’elle voulait. mais qu’elle était conne, à tendre la main comme ça. évidemment que niccolò le verrait comme une perche, elle avait oublié comment le don juan fonctionnait. les lèvres sur le dos de sa main sont assez pour lui donner des papillons dans le ventre en plus d’être horrifiée. fallait dire que ça n’aidait pas qu’il soit né avec les traits d’un ange, mais il savait que le démon l’habitait. ébahie par tant d’audace, elle peine à articuler le premier mot de sa tirade alors que l’homme s’installe tranquillement devant lui. « you… you- » son doigt pointé vers lui, avant de pousser le plus long soupir que l’homme avait connu. « it’s so hard to deal with you, my god. » qu’elle marmonne, presque pour elle-même avant d’affronter son destin, ignorant le regard pesant du responsable du café, intransigeant sur l’accueil de leurs visiteurs. mais il recommence le suisei, tente à nouveau d’avoir erin dans son lit et cette fois-ci, elle n’est pas aussi embarrassée qu’elle ne l’était au woodstick, sous la tente. « ranieri, you want to get laid so bad ? » le sarcasme débordant, un grand sourire sur ses lèvres avant d’entendre son nom à nouveau, se retourne vers le responsable qui voudrait lui lancer des éclairs. « orh, okay. … you have a dark aura, ranieri. you should fix that. » un simple constat, mais ce n’était pas la nouvelle du siècle. elle est boudeuse quand elle se force à être correct avec la terreur qui lui faisait face. « what do you want to know about your future ? »

un sourire satisfait s'empare de ses lèvres alors que la beauté qui lui fait face commence à bégayer. « cat got your tongue ? » il n'a encore rien dit qu'elle perd déjà ses moyens. ça va être facile, pense l'héritier alors qu'erin se ressaisit doucement. il était si sûr de lui qu'il considérait déjà la partie gagnée, niccolo. et pour cause, il avait réussi à faire flancher la reine des glaces avec un simple baiser. l'italien ne répond pas à la provocation de la fugi et joue le parfait gentleman, ce qui l'agacerait plus que n'importe quels mots. son attitude exemplaire lui vaut la protection du maître des lieux, qui semble attaché à ce qu'il reçoive le meilleur accueil possible de la part de sa petite bénévole. la deuxième fois, le responsable finit par la reprendre. doucement, le délégué se penche vers la belle. « come on, erin. be a good girl from now on. » lui assène t-il en un murmure dominateur. l'ordre est ferme, tandis que la voix de l'italien se pare d'accents suintants de chaleur. oh, il sait ce qu'il fait, nicco. n'ayant pas oublié le petit manège d'erin, il finit par répondre le plus sincèrement du monde à sa question intime. « of course i want to get laid. preferably with you. » puis il se réinstalle dans son fauteuil, l'air de rien.

la lecture est rapide, et décevante. le terrible n'apprend rien de nouveau, ni d'excitant. « what do you mean by dark ? » demande t-il naturellement, prêt à voir si erin sera capable de lui citer une des atrocités qu'il a perpétré. lui, ou sa famille. « i don't know... surprise me. »

elle était têtue, erin. elle refusait de voir la réalité ; accepter qu’elle avait perdu dès que le suisei était rentré sous la tente. honteuse face au garçon à la langue trop pendue, qui avait réponse à tout, et qui rendait erin si confuse. pourquoi ? la déléguée hautaine et toujours droite dans ses bottes ne faisait que se liquéfier, les joues teintées d’agacement, la barrière menaçant de s’effondrer, ignorant ce qu’il y avait derrière et elle ne voulait pas le savoir. « just.. shut up. » qu’elle marmonne entre ses dents, loin du regard de l’italien avant d’inspirer profondément, prête à s’y plonger. elle hurlerait surement de cette situation dans son oreiller quand elle y repensera avant de s’endormir. son esprit était parfois son pire ennemi. « be a good girl, my ass. », roulant les yeux vers le ciel avant d’accepter son sort, – et ne pas se faire tirer les oreilles par le superviseur.

sa première lecture ne semble pas satisfaire le délégué. cette réaction qui aurait dû normalement plaire à erin lui fit ressentir toute autre chose, quelque chose qu’elle n’arrivait pas à identifier. de la déception ? « you’re not surprised. you already know that you’ll have a shitty life ? that’s sad. » articulé factuellement, sans émotion. elle se fait plus sérieuse, faisant honneur à son côté paternel. ses visions étaient toujours aléatoires, mais c’était assez pour qu’elle se fasse une petite idée. des flashs qui n’avaient pas de sens, il n’y avait plus qu’à recoller les morceaux. « dark. you’re lethal. » qu’elle chuchote, son regard croisant le sien, incertaine. son instinct, lui, ne l’avait jamais trompé. elle savait depuis le début qu’elle faisait face à un homme qui pouvait se faire dangereux, qu’on ne voulait pas avoir du mauvais côté. « but there’ll be light. your future looks bright, you'll have a good life. … everything you want. » qu’elle rajoute en grinçant des dents. sa main effleure la boule de cristal, croise encore le regard de niccolò et un hoquet de sursaut quand une autre vision la surprend, une vision si claire que les précédentes, et la même scène qu’elle avait déjà vu il y a des années. la vision de l’autel. intact, elle était toujours là. son destin restait inchangé.

pour une fois, il lui obéit. l'italien se laisse aller dans son fauteuil, la colonne reposée contre son dossier moelleux. ses mains viennent se joindre l'une avec l'autre et viennent se loger contre ses abdos. on croirait un homme d'affaires comme ça, attendant les propositions du concurrent, prêt à conclure son marché. niccolo, il n'a plus que ses yeux qui parlent, assombris d'envie pour celle qui lui tient tête. la teinte rouge que prennent les joues d'erin après sa proposition lui suffit à lui arracher un sourire, toujours plus amusé par l'effet qu'il avait sur l'américaine.

« a shitty life ? come on, heller. » il interrompt enfin son silence pour rouspéter contre les propos de sa belle voyante. « you should know better, you're the one stalking my instagram. » les voitures, les yachts, le golf, les filles... un autre moyen lui est offert d'étaler à tous sa richesse, et erin en sait quelque chose. c'est bien elle qu'il avait surpris à screener son profil il y a quelques temps, trahie par le réseau social. c'est quand elle commence à évoquer les malheurs dont sa famille s'est rendue coupable qu'il sent son coeur rater un battement. le môme est troublé par le courage de la femme qui lui fait face, lui crachant sa sale vérité au visage. il est mauvais. jamais personne n'avait osé évoquer les crimes du paternel, dont profitait son rejeton. niccolo ne revient à ses sens que quand des lèvres de la blonde s'échappe le mot lumière. le délégué se penche en avant vers elle, se fendant de son beau sourire. « everything i want ? » demande t-il, sa voix pleine de chaleur. « does this mean that you're a part of my future ? for real ? » leurs regards se croisent mais la gamine est prise d'un sursaut, brisant leur moment. nicco, il voit ses yeux devenir absents quelques instants, puis la revoilà. livide. « what's going on ?? » il lui attrape la main, inquiet de l'état de la fugi. « are you okay ? »

elle avait rejeté cette vision mainte et mainte fois, et pourtant elle s’était représentée, devant lui comme pour enfoncer définitivement le clou, et la faire sortir de ce déni dans lequel elle s’était enfoncée. niccolò ranieri serait son époux. et erin, elle était presque timide maintenant, n’osant pas croiser son regard. il avait déjà tout ce qu’il voulait, le ranieri, bien qu’elle n’a pas réagit au commentaire sur son instagram (il avait raison), pourquoi la voulait-il ? familière de la jet set sans y avoir ses habitudes, elle était certainement plus calme que les plus féroces fêtardes. « yeah.. everything you want. » haletante, alors que son regard croise enfin le sien, retour sur terre. « don’t worry, it’s just too much sometimes. i’m not skilled enough. » et ça ne la tracassait pas spécialement, ne s’étant pas destiné à une carrière de madame irma. ce qui la préoccupait à ce moment était le regard inquiet du jeune homme posé sur lui. et ça l’intrigue. « are you serious ? » elle ne s’est pas demandé pourquoi ces mots sont sortis d’entre ses lèvres, elle qui voyait toujours l’homme comme quelqu’un qui passait d’une proie à l’autre, et la fugi avait probablement raison. elle le regretterait probablement, cette question. « ‘cause yes, if you want me to be part of your future, you can. you can have everything you want after all. » répétant en écho ses paroles avant de se redresser, le regard illisible, son visage s’approchant du sien jusqu’aux lèvres… avant de se pencher vers son oreille pour rajouter, « but don’t forget who you are. don’t draw people in your darkness. »