greyscale – tianyi

Le ciel se fait capricieux, comme son cœur, les cumulonimbus menaçant de peindre aux couleurs de la pluie la journée des familles et des amoureux venus chercher au parc les quelques rayons de soleil de cette fin de saison, s’ils sont chanceux,ils auront peut-être quelques flocons et dans leur misère trouveront-ils sans doute quelques sources d’émerveillement. Hiromi se fiche des humeurs du temps, mais voudrait bien voir ces maintes gens s’éparpiller à la première goutte, pour retrouver le tableau calme et sinistre du parc en fin d’une courte après-midi d’automne, qui siéra celui qu’iel attend à merveille, les braises sous les feuilles mortes comme seul réconfort.
Ses pensées divaguent tandis qu’iel dessine, à même le sol à l’aide d’une brindille, des petits pentacles pour garder au chaud ses petits trésors, un sort de feu faible qui n’a pas volonté de faire naître un brasier. Son long manteau de feutre traîne dans les feuilles et la poussière, concentré sur sa tâche mécanique Hiromi le remarque seulement quand un enfant le piétine en venant chercher son ballon qui était arrivé non loin d’ellui. Il s’excuse poliment et repart comme une flèche jouer avec ses amis et Hiromi ne peut que constater les dégâts, s’étant relevé pour s’épousseter, iel remarque à l’instant que Tianyi est arrivé et l’observe.
– Eh bien tu ne dis rien ? J’ai cru que tu n’arriverais jamais, se lamente-t-iel avec une pointe de malice. Mon trench-coat est ruiné, mais ne t’en fais pas, les goûter est bientôt prêt ! Hiromi lui tend la main pour l’inviter à se rapprocher de son petit trou aux merveilles. Tu as intérêt à apprécier ma petite surprise, j’espère au moins que ma compagnie te changera les idées. Iel tente d’esquisser un sourire, se rappelant trop tard qu’iel porte son masque.

Les écouteurs dans les oreilles, Tianyi s’avança dans ce parc où Hiromi lui avait donné rendez-vous. Il n’allait jamais dans les parcs, d’habitude. N’avait pas de temps à dépenser à se promener dans des parcs, là où les gens trouvaient la paix et s’amusaient le cœur apaisé. Tianyi ne faisait pas partie de ces personnes-là ; pas de ceux qui connaissaient un quotidien tranquille, capables de pique-niquer avec des amis ou de regarder des enfants jouer. Enfant, il n’avait jamais pu venir en famille dans un parc et adulte, il n’avait toujours pas de famille avec qui aller. Des amis, Tianyi n’en avait pas vraiment : des relations, oui, mais Tianyi ne savait jamais vraiment comment qualifier les personnes qui l’entouraient. Des personnes qui étaient là, prenaient plus ou moins de la place dans la pyramide de ses priorités. Hiromi prenait pas mal de place. Ou peu. Tianyi n’en était pas certain. Il se sentait confortable avec ellui, le flirt rapidement passé à une relation sans crocs, sans rien de plus. Se sentir confortable voulait-il dire que Tianyi ne se préoccupait pas de Hiromi ? Ou alors, qu’il l’appréciait bien ? Tianyi l’ignorait. Tout ce qu’il savait, c’était que Hiromi lui avait donné rendez-vous et qu’il n’avait pas refusé. Après tout, pourquoi pas passer son après-midi à faire dieu sait ce que Hiromi avait préparé. Peut-être voulait-iel lui garder la surprise, puisqu’iel lui avait donné rendez-vous dans un parc et non pas au lieu directement. Légèrement curieux, il finit par se montrer devant Hiromi, qui était encore accroupi à dessiner il-ne-sait-quoi dans le sol, jusqu’à ce qu’un enfant turbulent passe et lia réveille de son monde. Tianyi pencha légèrement la tête alors que leurs regards se croisèrent, sa main venant retirer ses écouteurs, l’autre siégeant dans la poche de son long manteau noir. Il haussa vaguement des épaules, pas le moindre préoccupé par son retard. « Tu me connais, » répondit-il d’un ton las. Il arqua un sourcil face à Hiromi qui semblait lui avoir effectivement préparé quelque chose, mais quoi ? « Je verrai cela au moment venu. » Il s’approcha de Hiromi et remarqua le petit feu non loin d'iels. Il fut davantage perplexe, se baissant pour venir observer ce joyeux bordel sans toutefois s'accroupir, veillant à ne pas tacher son manteau. « Qu’est-ce que c’est que ça ? » Était-ce là la fameuse surprise ? Le fameux goûter ?

Tianyi a toujours la moue facile et l’engouement absent, quand Hiromi lui propose n’importe quoi, (toujours de son initiative), Tian se fera attendre et fera toujours mine de venir à reculons et si cela pourrait en agacé plus d’un, Hiromi à l’inverse apprécie beaucoup ce petit jeu de scie, que son ami se laisse désirer pour parfois ne jamais montrer les bout de son nez. Qui y a-t-il de drôle avec quelqu’un qui tient toujours ses promesses ? Il y a un petit trésor à trouver dans les aléas de la vie et les changements d’humeur d’un jeune homme secret, méfiant et insolent.
– Tu vas voir, c'est une petite surprise de saison. Mais tu n’y auras droit qu’en échange d’une petite historie, il va falloir me dire pourquoi tu disparais parfois comme si le diable était à tes trousses. Une requête insipide, iel ne s’attend pas à ce qu’il se confie, mais iel voudrait voir à l’œuvre la capacité de Tianyi à envenimer toutes les situations, se sabotant lui-même ; une envie un peu déplacée de l’observer tisser la toile d’un mensonge, de façon à tirer à son sujet encore plus de conjectures, vraies ou fausses.